Neutralité du Net: des opinions divergentes
Par François Nadeau
Parmi tous les débats qui risquent d’occuper l’actualité aux États-Unis, celui sur la neutralité du Net risque de prendre une place particulièrement importante.
20 juillet 2017
En plus de toucher une corde sensible chez plusieurs internautes, le débat mobilise également une foule de grandes entreprises du domaine des technologies et des communications.
Même si la plupart des acteurs impliqués s’entendent sur les bienfaits du fait qu’Internet reste neutre, ouvert et accessible, ils sont divisés sur les règles qui permettent de préserver ces principes.
Une loi de 1934
En 2015, l’administration Obama, dans le but d’assurer la neutralité du Net, plaçait les fournisseurs de services Internet sous le Title II de la Communication Act de 1934. Sous cette loi, les services Internet sont considérés comme un bien public au même titre que les services de téléphone ou d’électricité. Sous cette loi, les fournisseurs de services Internet ne peuvent favoriser, ralentir ou encore bloquer certains types de contenus. En revanche, la Federal Communications Commission se retrouve avec une grande emprise sur les fournisseurs, dont un pouvoir sur le contrôle des prix des services.
La situation pourrait changer, puisque cette même FCC songe sérieusement à renverser les règles mises en place sous l’ancien gouvernement.
Les opposantsÂ
Le FCC fait face à des opposants de taille dans sa démarche visant à revoir les règles en place. Parmi eux, on compte Facebook, Google et Amazon. Ceux-ci s’inquiètent des impacts de la démarche du FCC et mettent en garde les internautes contre les effets de l’abandon des règles actuelles.
Selon eux, la neutralité du Net est essentielle. Cela empêche les fournisseurs de services Internet de favoriser certains contenus au détriment d’autres. Un fournisseur pourrait par exemple signer des ententes exclusives avec certains sites afin que leur contenu soit téléchargé plus rapidement. Une entente pourrait aussi permettre à certains partenaires, un site de musique en continu par exemple, que leur contenu soit exclu du volume de données téléchargées à l’intérieur d’un forfait de données mobiles (ce que le CRTC a décidé  d’interdire à Vidéotron, justement dans le but de préserver la neutralité du Web).
Le 12 juillet dernier, les opposants aux changements de règles ont tenu une journée de mobilisation où ils ont incité des millions d’internautes à écrire au FCC afin que ceux-ci maintiennent des règles favorisant la neutralité du Web.
Les partisans
On s’en doute bien, les gros fournisseurs de services Internet dont AT&T et Comcast sont en faveur de la récente démarche du FCC. Dans un document de 161 pages, Comcast mentionne d’abord être en faveur des principes liés à la neutralité du Net. Elle dit toutefois s’opposer au fait que ces services soient considérés comme des biens publics. Selon l’entreprise, les règles en place découragent l’innovation et la compétition dans le secteur des services Internet. C’est un point de vue que partagent également plusieurs autres partisans aux changements de règles.
Toujours selon Comcast, avant la mise en place des règles de 2015, très peu de violations des principes de neutralité du Web ont été répertoriées. Dans un domaine compétitif où l’expérience utilisateur est primordiale, Comcast allègue d’ailleurs qu’elle n’a aucun intérêt à bloquer, ralentir ou favoriser un contenu précis.
Une guerre pour le contrôle du Web
Autant chez les opposants que les partisans au changement de règle, on s’entend pour dire que les services Web ont évolué de belle façon dans les dernières années. Ceux-ci sont notamment devenus plus rapides, efficaces et accessibles. Toutefois, afin que cette évolution se poursuive, les uns allèguent qu’il faut maintenir les règles en place, alors que les autres plaident pour les modifier.
Pour plusieurs experts, ce conflit ne réside pas seulement sur une divergence dans la façon d’assurer la neutralité du Web, mais il s’agit en premier lieu d’une bataille pour le contrôle d’Internet.