IA en entreprise : les directions marketing à la recherchent de la « grande idée » plutôt qu’aux légers gains de productivité

2 décembre 2025
À défaut de savoir comment utiliser l’IA générative de manière « transformative », plusieurs entreprises se rabattent sur la quête de gains à court terme en productivité. Lors du plus récent Sommet des chefs du marketing 2025, il était intéressant d’entendre des responsables marketing émettre des doutes face à cette stratégie d’affaires.
Marc Dicko, chef de la direction marketing et numérique de L’Oréal Canada, a d’abord tenu à remettre les pendules à l’heure sur la frénésie qui entoure l’IA.
Certaines personnes s’attendent à gagner 10% d’efficacité en 3 jours… Il faut être très honnête sur l’utilisation que de cette technologie; nous sommes dans une phase hyper expérimentale. »
Le CMO de L’Oréal a rappelé la Loi d’Amara, selon laquelle l’humain, face à une technologie disruptive, a tendance à surestimer l’impact à court terme, tout en sous-estimant les bouleversements à long terme. Résolue à ne pas manquer sa transition, L’Oréal a posé plusieurs jalons de sa stratégie d’IA, avec entre autres une plateforme de création de briefs – à utiliser seulement en interne -, ainsi que le développement de technologies de diagnostics de la peau.
La stratégie plutôt que les gains de productivité
Lors de la même conférence, Imen Zitouni, première vice-présidente et cheffe du marketing d’Intact, a expliqué comment elle porte son attention sur les usages stratégiques de l’IA, plutôt que sur les simples gains incrémentaux de productivité, que tout un chacun tente de faire en confiant la rédaction de ses courriels à ChatGPT.
La première chose vers laquelle les gens vont en IA, c’est de voir comment ils peuvent augmenter leur productivité, note-t-elle. C’est la base, mais tu ne changes pas la vie avec ça… Nous, notre vision chez Intact, c’est que l’IA est plus qu’un changement [technologique], c’est une perturbation importante. C’est le moment de réfléchir aux gros gains à faire avec cette technologie. La productivité, c’est le fun, mais ça donne uniquement des gains incrémentaux. »
Imen Zitouni cite en exemple un cas récent aux États-Unis où la firme d’assurance Progressive Insurance a utilisé l’IA pour produire 96 versions différentes d’un spot publicitaire radio en moins de deux semaines, selon une combinaison de six scénarios, quatre voix et quatre musiques possibles. Chaque auditeur était exposé à une publicité correspondant à leur « persona », avec de spectaculaires résultats d’écoute et d’engagement.
Cela a augmenté leurs ventes de façon significative. Je trouve que c’est un bel exemple d’utilisation de l’IA, oui, pour de la productivité, mais aussi pour repenser une stratégie de marketing. Depuis longtemps en marketing numérique, on parle d’une personnalisation ‘one to one’ comme d’un idéal à atteindre, mais qui n’est pas vraiment réaliste ou hyper coûteux. Mais là, on voit qu’on crée cette personnalisation et qu’il est plus facilement possible de le corréler à des résultats d’affaires. »
Aller au-delà des usages quotidiens
Un autre exemple marketing éloquent est l’utilisation par Rona de l’IA pour remplacer les « focus groupes » de certaines de ses campagnes marketing, tel que rapporté par Catherine Laporte lors de la même discussion. Pour Imen Zitouni, c’est en regardant au-delà des usages quotidiens de l’IA que les CMO vont avoir l’écoute de leur équipe de direction.
Un jour, un membre du comité de direction d’Intact m’a dit : si tu veux intéresser un CEO, il faut vendre de grandes idées. Les gains incrémentaux, ils ont d’autres choses à se soucier. Du moins, on leur souhaite! Il faut se concentrer sur les grandes idées. »
Avec une équipe de 500 spécialistes en IA, Intact a déjà quelques longueurs d’avance pour mener cette réflexion, assure-t-elle.
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