Teinter vos textes de vocabulaire régional pour le référencement
Par Kristof Maret - Référencement PME
La langue a ceci de vivant qu’on ne peut l’empêcher d’évoluer en fonction d’influences dont personne n’a le contrôle. Elle régionalise et c’est un point que la rédaction SEO devrait mieux exploiter.
Après neuf ans passés au Québec, j’ai, en tant que Français, eu le temps d’assimiler la parlure qui m’entoure et n’en suis plus à m’étonner des nombreuses tournures de phrases qui baignent mon quotidien.
En marge de cette introduction, je tiens à ajouter que je suis fou de ce fantastique poète qu’est Fred Pellerin et que je le comprends à la première écoute… Pas pire pour un Français…
Respectueux de mon pays d’accueil et «quasi assimilé»:
- je refuse d’alimenter les conversations courantes qui tendent à démontrer que les Français utilisent plus d’anglais que les Québécois
- je ne relève plus les « québéquismes » que j’utilise parfois sans même m’en rendre compte
- je ne suis (presque plus) choqué par les expressions comme « levez-vous debout »… même lorsqu’elles viennent du professeur de mon fils
J’ai découvert durant ces 9 années:
- certains jolis mots sauvés du vieux français ou de ses patois régionaux — brunante, noirceur, boucane, broue, maganer, enfiroiper, garrocher, capoter, achaler, dispendieux, asteur, etc…
- et d’autres issus des parlés autochtones — caribou, achigan, pécan (pas la noix ! le carcajou, parka… –
- je me suis aussi habitué aux traductions littérales d’expressions purement anglaises comme « fin de semaine », « tomber en amour », « prendre une marche » ou « aller au parté »
(Je n’insiste pas sur les «ambigus» gosses, turluter, écœurant, ou pedigree…)
Si la magie des mots a tout pour me séduire, il n’en reste pas moins, qu’en tant qu’amoureux du langage, je n’adhère pas aux pures fautes de français et ce tant à l’écrit qu’en conversation.
Je porte à ce propos, une attention particulière et amusée aux capsules de Guy Bertrand sur Radio Canada qui chaque semaine revient sur les erreurs commises par les animateurs de la station, les explique et propose des équivalents plus académiques.
Traducteur agréé, il mène cette chronique avec humour, finesse et grande intelligence en pointant les fautes et expliquant le pourquoi ou leur origine. Ses capsules révèlent l’intérêt des Québécois pour une langue aussi belle que la Province…
J’ai par ailleurs beaucoup partagé le délicieux opuscule d’Huber Mansion, «101 mots à sauver d’Amérique», qui brise bien des idées reçues sur les origines de 101 vocables «québécois» sélectionnés.
Ces références m’ont convaincu — le fallait-il vraiment ? – que la langue, bien que malléable à merci, aime à être respectée et que les rédacteurs, traducteurs et autres écrivains publics ont pour rôle de défendre au quotidien un certain niveau de langage… J’en fais partie et… tant pis si je passe pour un maudit français.
Traduction franco-québécoise pour le SEO?
Cette longue mise en bouche a pour but d’aborder ce que certains appelleront à tort «la traduction franco-québécoise» et qui s’apparente plus à de la traduction enrichie, sorte d’interprétation du texte de départ.
La problématique pour les agences de traduction, lorsqu’elles doivent passer un texte de l’anglais au français, reste de bien cerner le public ciblé, le lecteur final et le but de la publication.
Ainsi lorsqu’on parle de langage administratif (une grande part du travail de la traduction), l’expression langagière respectera un cahier des charges et devra faire le choix entre une expression correcte aux couleurs québécoises et celle plus française plus académique… dépendant directement des paramètres cités plus haut.
Correcte ou incorrecte?
- parlez-vous d’une année académique ou d’une année scolaire?
- est-ce que vous adressez un problème ou est-ce que vous le traitez?
- votre client est-il en affaires ou fait-il des affaires?
- aiguisez-vous vos crayons à l’année longue ou les taillez-vous toute l’année?
Les exemples ne manquent pas et plutôt que de «choisir entre deux alternatives»… «j’hésite devant cette alternative» (le pléonasme est sans pitié !)
C’est théoriquement l’Office québécois de la langue française qui devrait avoir le dernier mot et les traductions gouvernementales les plus officielles recommandent les règles de cet organisme très officiel.
Pourtant, teinter son écriture de quelques tournures locales peut se révéler payant…
Pourquoi écrire québécois pour Google.ca (fr)
On sait que la rédaction Web optimisée SEO est une écriture technique qui doit conjuguer clarté et simplicité d’un discours ayant un impact sur le lecteur avec des signaux expressément adressés aux moteurs de recherches.
Cela ne passe pas seulement dans les fameuses balises SEO, les tags <H> ou le formatage plus ou moins technique du texte.
Cela dépend aussi — je dirais surtout — du langage lui-même, des mots utilisés, des lieux cités, et négliger l’utilisation d’un vocabulaire local est une erreur à éviter.
Dans ce contexte, on éludera pourtant tout vocable familier, impropre et on veillera à publier une syntaxe et une orthographe irréprochables.
Les moteurs de recherche ont «lu» l’ensemble du Web, Google search distingue un lexique par pays et Google Adwords distingue parfaitement les vocabulaires des deux pays.
Par exemple le CPC (coût par clic) sur l’expression «exterminateur coquerelle» coûte 5.15$ aux Québécois et rien au professionnel français tandis qu’à l’inverse «exterminateur cafard» affiche 2.15€ en France et rien pour les professionnels de la belle province … faut-il vraiment expliquer ?
Autre exemple, la problématique du mot roulotte contre caravane est plus complexe puisque les mots existent dans les deux dictionnaires, mais affichent une définition fort différente.
Bref ne pas considérer ces éléments de langage est une erreur majeure dans le contexte du référencement naturel qui fait partie du marketing Web.
Google business propose deux listes de catégories d’entreprises, comparez la liste française avec celle canadienne-française. (Ouvrez ces deux liens dans deux pages côte à côte pour percevoir les différences ténues d’un pays à l’autre). Naturellement un peu de parlure québécoise n’est qu’une cerise sur le gâteau.
Des balises et des paramètres à surveiller
Naturellement, il ne suffira pas de distiller quelques termes élégants du «français local» pour atteindre les sommets du positionnement dans les moteurs de recherches.
Veillez entre autres à déclarer la langue de votre portail en «Français du Canada» (<html lang= » fr-CA »>) plutôt qu’en français de France (<html lang= » fr-FR »>), une erreur que font bien des webmestres par pure ignorance de cette balise ou par incompétence des codeurs.
Autre erreur classique: celle qui consiste à oublier de déclarer son territoire cible dans Google. Le site se retrouve alors immanquablement identifié sur les USA.
Réfléchissez aussi à ne choisir l’extension «. com» que si votre marché le justifie alors qu’un «.ca» pourrait mieux vous identifier régional.
Face à une compétition toujours plus dure, ce ne sont pas des détails.
Avec une capacité d’indexation du Web mondial ahurissante* (Google recherche dans 30 milliards de pages Web, 100 milliards de requêtes par mois. Chiffres de 2013), Google distingue les textes québécois des pages françaises, les trie et les classe finement selon leur langue et n’est pas, à qualité égale, sans valoriser le contenu aux accents locaux.
À l’instar des films américains qui sont doublés deux fois avec des comédiens des deux bords, pardon, des deux côtés de l’Atlantique (on parle de double doublage), les textes SEO du Web devraient considérer le marketing des accents locaux.
*Malgré cette puissance de feu, John Mueller confirme que l’analyse complète des contenus d’un site et leur impact général sur le positionnement peut prendre 6 mois. (Référence en 29e minute de cet hangout de décembre 2014).