Ce que font certains Américains avec leurs économies sur l’essence
Par François Nadeau
Selon l’American Automobile Association (AAA), 16,5 millions d’Américains paieraient pour remplir leur véhicule avec de l’essence Super alors que ce ne serait pas nécessaire.
Chaque année, ce sont environ deux milliards de dollars qui seraient ainsi gaspillés, alors que l’essence ordinaire, moins chère, donnerait sensiblement les mêmes résultats.
Qu’est-ce qui explique ce phénomène?
Selon le AAA, il pourrait s’agir d’un manque de connaissances de certains individus qui associent le libellé Super à une meilleure qualité d’essence, alors que ce n’est pas nécessairement le cas.
D’autres explications sont également avancées, notamment des comportements surprenants de la part des consommateurs, lorsqu’ils sont confrontés à une variation de prix.
Des comportements irrationnels
Aux États-Unis, les foyers à revenus moyens ont économisé environ 477$ en 2015, alors que le prix à la pompe a diminué de 28% par rapport à 2014, selon JPMorgan Chase Institute.
Lorsque de telles économies se présentent, une partie de celles-ci sont alors redirigées vers l’épargne ont encore vers d’autres types de dépenses, par exemple des sorties au restaurant.
Toutefois, une autre part est utilisée pour acheter plus d’essence, et de meilleure qualité.
C’est ce qui ressort d’une étude publiée par l’Université Brown et l’économiste Justine Hastings. Celle-ci démontre que lorsque le prix de l’essence augmente, les consommateurs ont tendance à passer de l’essence Super à l’essence traditionnelle. On peut donc penser qu’en cas de baisse des prix, comme ce fut le cas en 2015, les automobilistes optent pour le comportement inverse.
Peu importe le prix de l’essence, cela ne devrait rien changer au type de carburant dont un véhicule a besoin. Alors pourquoi certains automobilistes modifient-ils leur choix en fonction du prix?
C’est ce que l’économiste Richard Thaler a défini dans les années 80 comme de la comptabilité mentale («mental accounting»). Selon ce concept, un consommateur aura tendance à fixer un budget pour chacun de ses postes de dépenses (essence, épicerie, loisirs, etc.). Lorsque le coût relié à un de ces postes varie, le consommateur aura tendance à modifier son comportement d’achat à l’intérieur de ce poste, même si cela ne représente pas forcément un acte dit «rationnel» selon la théorie économique.
Ce concept porte à réfléchir.
Pour un centre de ski qui, par exemple, déciderait d’augmenter le coût unitaire de ses billets, il est possible qu’un skieur décide d’absorber la hausse, réduisant ses dépenses ailleurs. Mais il se peut également qu’il choisisse de venir moins souvent au centre pour ne pas dépenser davantage, et ce même s’il aime toujours autant skier.