La parité en agence, c’est bon pour la business!
Bien qu’il y ait beaucoup de femmes au sein des agences de communication, la parité dans les hautes sphères de la direction n’est pas encore atteinte. Stéphanie A-Lebon, directrice du développement des affaires chez Havas, n’hésite pas à prendre la parole pour expliquer à quel point la parité est bonne pour les affaires. On en parle avec elle.
Selon l’étude économique de l’A2C, plus de la moitié (57,2%) des employés d’agences au Québec sont des femmes. Sauf qu’on ne les retrouve que très rarement aux postes décisionnels: les associés sont à 80,9% des hommes, de même que 77,4% de la direction générale et 64,3% des membres des conseils de direction.
L’idée n’est pas de remettre en cause la crédibilité des hommes qui occupent ces postes de direction, mais plutôt de se demander pourquoi si peu de femmes parviennent à faire pareil. On dirait que pour se réaliser professionnellement tout en ayant une famille, elles sont obligées d’aller côté client», déplore Stéphanie A-Lebon, directrice du développement des affaires chez Havas.
Ainsi que l’a souligné Wendy Clark, CEO de l’agence DDB en Amérique du Nord, on n’hésite moins à prendre une chance sur un homme que sur une femme. On craint en effet bien souvent que celle-ci ne délaisse ses responsabilités professionnelles pour ses obligations familiales.
Déjà, c’est assez réducteur de penser que toutes les femmes ont envie de fonder une famille, mais ça c’est un autre problème. Il faut surtout intégrer qu’un congé de maternité, ce n’est pas un an de vacances dans le Sud! C’est un moment charnière pour une femme, où elle développe de nouvelles compétences et apprend à faire plus en moins de temps. De nombreuses études prouvent d’ailleurs qu’une jeune maman est justement plus efficace lors de son retour à l’emploi», indique Stéphanie.
Pour elle, la solution passe non seulement par un changement de mentalités, mais aussi par davantage de flexibilité au sein des agences: reconnaître le dévouement des employés autrement que par le nombre d’heures (et d’overtime) réalisé, ou encore permettre des horaires aménagés en fonction de ceux des écoles (eh oui!)
Des pitchs teintés…
Dans le même ordre d’idées, on retrouve plus souvent les femmes au service conseil qu’en création: aux États-Unis, environ 11% seulement des directeurs de création sont des directrices.
Et pourtant: les produits de consommation courante sont aussi bien achetés par des hommes que par des femmes – manquer de parité dans une équipe de création peut teinter les pitchs, et on peut passer à côté d’une partie de notre cible.
Sans compter les traditionnels «comptes de gars» et «comptes de filles»: grande nouvelle, les femmes sont possiblement celles qui achètent le déodorant de leur conjoint, et il se peut qu’elles regardent aussi le football.
Tout n’est pas blanc ou noir, et les femmes ne constituent pas une niche: elles représentent 50% de la population. De plus, elles achètent majoritairement les produits de consommation! De plus, nous ne sommes pas toutes uniformes, les campagnes doivent refléter cela», insiste Stéphanie.
Vive la diversité!
De la même façon, Stéphanie regrette que la composition des agences ne soit pas plus représentative de la population québécoise: pour créer des campagnes publicitaires efficaces, qui répondent aux attentes et besoins de la population ciblée (et des clients), il serait pertinent qu’elle soit également représentée autour de la table du remue-méninges!
L’équipe idéale pour un remue-méninges, selon moi, est composée de personnes avec différents backgrounds: culture, âge, genre, cursus universitaire… C’est en confrontant nos différences que l’on trouve LA grande idée, celle qui est porteuse. Un Québécois sur 5 est issu d’une minorité visible: il achète les produits pour lesquels on réalise des campagnes, il ne faut pas l’en écarter!», explique la directrice de développement.
Revoir notre perception du leadership
Jeune femme vive et créative, elle-même fille d’immigrants, Stéphanie A-Lebon a très vite appris qu’elle allait devoir créer sa chance et ne jamais avoir peur de poser des questions, de lever la main, bref: de se faire remarquer.
Pour celle qui croit fort en la nécessité de créer son «personal branding», la perception classique du leader (un homme sûr de lui) doit absolument changer:
Un bon leader est à l’écoute, il sait rassembler et faire progresser les autres. On va souvent penser à promouvoir quelqu’un qui a confiance en lui, qui crie plus fort que les autres, en un sens. Sauf que ça, c’est un bon capitaine, mais ce n’est pas un leader inspirant», conclut-elle.
À bon entendeur…