Bilan 2018 de l’industrie : la grande ruée vers l’intelligence artificielle
Par La Rédaction
20 décembre 2018
Cela fait plusieurs années déjà que l’on parle d’intelligence artificielle à Montréal et au Québec. Mais en 2018, la grande promesse est devenue une réalité vraiment concrète avec des annonces d’investissement de plusieurs joueurs de l’industrie. En attendant la démocratisation progressive l’année prochaine ?
A l’heure des traditionnels bilans de fin d’année, il est difficile de faire l’impasse sur l’ampleur qu’a prise l’intelligence artificielle dans la vie de l’industrie, notamment à Montréal. Certes, la tendance n’est pas nouvelle. Certes, l’expression est utilisée à toutes les sauces, parfois à tort et à travers. Certes, enfin, on sait qu’elle est notre futur et qu’elle va devenir omniprésente dans la plupart des logiciels offerts sur le marché.
Il m’empêche. A contrario de la réalité augmentée par exemple, également très présente dans les bouches et les médias mais qui peine à vraiment décoller concrètement, l’intelligence artificielle a connu une année faste si l’on regarde l’écosystème montréalais.
Les grands joueurs de l’industrie ont commencé à se positionner clairement en 2018
En mai, Cossette a conclu une entente de coentreprise avec Stradigi AI, un fournisseur canadien de solutions d’intelligence artificielle.
Nous nous associons à un leader du domaine de l’intelligence artificielle afin de continuer à développer la solide expertise en technologies et en marketing relationnel que nous avons acquise au cours des dernières années. Il s’agit d’un pas important pour bonifier notre offre de services au grand bénéfice de nos clients, et ce, très rapidement », expliquait alors Louis Duchesne, le vice-président exécutif et directeur général de Cossette.
Peu de temps après, c’est le groupe Havas, en marge de C2 Montréal, qui annonçait la création d’un centre d’innovation en IA sur les bords du Saint-Laurent.
La région constitue un centre névralgique en matière d’innovation et d’IA. Havas Montréal est donc l’agence tout indiquée pour offrir à ses clients une gamme complète de services et de solutions axées sur l’IA, assurait Yannick Bolloré, président-directeur général du Groupe Havas et président du Conseil de surveillance de Vivendi.
Enfin, en novembre dernier, c’est lg2 qui abattait sa carte « IA » en concluant une entente de partenariat avec l’entreprise Keatext, chef de file en intelligence artificielle appliquée à l’analyse de texte conversationnel.
Pour Anne-Marie Castonguay, vice-présidente, Données et intelligence de lg2 « l’expérience client est le principal différentiateur de nombreuses industries. Ce partenariat s’inscrit dans notre volonté d’aider nos clients à puiser dans la mine d’or de feedback consommateurs et employés afin de dégager des insights à fort impact et de prioriser leurs actions. »
Ces développements technologiques viennent s’ajouter à ceux des géants du numérique qui n’ont pas attendu pour faire de Montréal un de leurs pôles majeurs en IA. A l’image de Facebook, Google, Microsoft, Samsung ou encore IBM.
Sachant que l’intelligence artificielle n’a pas qu’un impact sur les solutions Web. Dans les domaines qui nous concernent sur Isarta, on peut aussi mentionner son apport dans les RH. Ce que nous confirmait d’ailleurs l’été dernier Jean-Baptiste Audrerie, psychologue organisationnel et chef de pratique chez Horizons RH :
La fonction ressource humaine est une fonction de prédiction. On cherche à prédire la masse salariale, la productivité des employés, prédire la rétention et le départ des employés, etc. L’intelligence artificielle peut donc vous aider à faire ces prédictions, en se basant sur des milliers d’interactions. »
L’IA, un argument de vente pour Montréal
« Depuis un an et demi, l’intelligence artificielle est devenue le meilleur argument de vente pour attirer des entreprises étrangères à Montréal« , expliquait récemment à la Presse Stéphane Paquet, le vice-président aux investissements étrangers de Montréal International. Derniers exemples en date : les arrivées prochaines de trois compagnies britanniques dans le secteur.
Selon l’organisme de promotion de la métropole, Montréal compte ainsi plus de 300 chercheurs et étudiants au doctorat dans les domaines liés à l’intelligence artificielle, dont la plus importante concentration de chercheurs au monde avec le MILA (l’Institut québécois d’intelligence artificielle), 11 000 étudiants inscrits à un programme universitaire spécialisé en intelligence artificielle et en traitement des données et près de 93 000 emplois en lien avec l’IA. De quoi nourrir la croissance des années à venir.
Il y a trois ans, je rêvais d’une grande Silicon Valley de l’intelligence artificielle à Montréal. Mais, je ne m’attendais pas à ce que cela soit aussi rapide ! », s’étonne le Pr Yoshua Bengio, un des pionniers de l’apprentissage profond et directeur scientifique du MILA.
Le scientifique est d’ailleurs très impliqué pour faire venir des professeurs en IA dans la métropole québécoise et pour former plus de gens et plus vite, pour répondre aux besoins de l’industrie.
Recruter des étudiants, ce n’est pas un problème car il y a beaucoup d’engouement pour ce sujet. L’enjeu, ce sont les professeurs. C’est une ressource qui est très rare en ce moment car il n’y a pas beaucoup de gens qui ont cette expertise. Et cela représente un goulot d’étranglement car ce sont eux qui forment la prochaine génération ! »
De ce point de vue, l’annonce du financement de 14 chaires universitaires à Montréal (11 à Toronto et 4 à Edmonton) par le gouvernement fédéral tombe comme une excellente nouvelle.
Montréal en pointe également sur les questions éthiques
Mais Montréal ne cherche pas qu’à devenir un chef de file économique ou scientifique : elle entend bien aussi jouer un rôle pour sensibiliser aux enjeux éthiques de l’IA.
D’où le dévoilement, le 7 décembre dernier, en marge de la grande conférence NeurIPS, de la Déclaration de Montréal, un manifeste pour un développement de l’IA « vers des finalités moralement et socialement désirables ». Les comités responsables de la création de ce document ont ainsi proposé 10 grands principes pour encadrer l’intelligence artificielle, parmi lesquels le bien-être, le respect de l’autonomie ou encore la protection de l’intimité et de la vie privée.
Il faut que l’IA serve à tout le monde. Il faut donc qu’il y ait un mouvement pour mieux encadrer son développement et rassurer les gens, sinon cela va nuire à l’économie et au développement », soutient le Pr Yoshua Bengio.
Autant dire que l’on risque d’entendre encore beaucoup parler d’intelligence artificielle l’année prochaine au Québec !