Anne-Marie Dassylva, une avocate au service des influenceurs
25 juin 2024
Révolue, l’époque où les influenceurs se faisaient la plupart du temps payer en produits et autres cadeaux plus ou moins dispendieux. Ces dernières années, le monde des influenceurs s’est professionnalisé, avec des ententes de services à la clé. Nous avons abordé la question avec l’avocate Anne-Marie Dassylva, fondatrice de l’agence de représentation Dass Much, qui vient de lancer un nouveau «service d’encadrement juridique» pour influenceurs.
Ces dernières années, le statut d’influenceur en a parfois pris pour son rhume, en raison de diverses frasques médiatiques (comme l’oubli du paiement de certains impôts par exemple). Or, cela n’empêche pas Anne-Marie Dassylva de croire à la « noblesse » de cette pratique.
Les créateurs de contenu ne se contentent plus de vendre des produits aux jeunes ; ils participent à des initiatives importantes pour informer et sensibiliser le public sur des causes variées», fait-elle remarquer dans un communiqué de presse.
Il faut aussi admettre que la pratique s’est éloignée de sa dynamique initiale, qui a longtemps reposé sur l’échange de matériel promotionnel « gratuit » contre de la visibilité sur les réseaux sociaux.
Ces quatre dernières années, cela s’est beaucoup professionnalisé, fait valoir Anne-Marie Dassylva en entrevue à Isarta Infos. Il existe certainement encore aujourd’hui des gens qui font cette activité dans leur temps libre, pour obtenir des cadeaux promotionnels, mais tous les influenceurs avec qui je travaille en font un travail à temps plein, ou à temps partiel, pour lequel ils sont rémunérés. D’ailleurs, j’ai des créateurs de contenu qui refusent de recevoir des colis «PR», parce qu’ils n’ont pas le temps de les gérer. »
Encore de l’éducation à faire
Selon l’avocate, cette «professionnalisation» s’est produite à partir du moment où les marques ont décidé d’investir une part de leur budget de marketing «traditionnel» dans des campagnes de publicité sur les réseaux sociaux. La participation des influenceurs s’est dès lors imposée d’elle-même.
Les agences de marketing ou même les marques qui engagent [mes clients] ont souvent leur propre modèle de contrat. Les parties s’entendent sur la création d’un contenu à une valeur donnée, qui va être utilisée pendant un moment X avec une amplification Y. »
Contrat ou pas, l’avocate note qu’il y a encore beaucoup d’éducation à faire pour établir des partenariats équitables pour tous les partis. Habituées aux campagnes traditionnelles, les marques peinent parfois à accorder toute la liberté aux créateurs pour imaginer et concrétiser leur concept publicitaire.
Les concepts sont rarement approuvés du premier coup, ce qui est normal, car il y a souvent de petites modifications à faire pour mettre de l’avant le produit, à la demande de la marque. Mais une marque ne peut demander des modifications à l’infini, sans rémunération conséquente. D’où l’importance d’avoir un représentant professionnel pour analyser et négocier les contrats [avec les agences], et veiller à leur application », indique-t-elle.
En s’alliant à un influenceur, les marques s’intéressent d’abord et avant tout à la visibilité qu’elles peuvent aller chercher auprès de ses abonnés. Toutefois, un influenceur peut aussi être reconnu pour son talent en tant que créateur de contenu.
Il arrive que certaines marques retiennent les services d’un influenceur pour créer du contenu qui ne sera pas explicitement attribué à l’influenceur. Pour avoir une présence sur les médias sociaux, les marques ont besoin de produire du contenu sur une base quotidienne ou, du moins, chaque semaine. Et comme plusieurs influenceurs sont aussi photographes ou disposent d’un œil artistique, ils peuvent être appelés à contribuer de cette façon. »
C’est alors une opportunité de rémunération « supplémentaire », pour un influenceur qui est aussi créateur de contenu.
Le point sur l’encadrement du métier
Pendant longtemps, il a régné une espèce de flou autour du métier d’influenceur, par rapport à ce qui était éthique ou légal de faire. Qu’en est-il aujourd’hui?
Tout cadeau doit être déclaré à l’impôt, rappelle l’avocate. Il est donc important pour les créateurs de contenus de choisir les colis qui veulent recevoir. »
Plus globalement, l’avocate rappelle que la loi sur la publicité au Canada exige – depuis toujours, ce n’est pas nouveau – de mentionner clairement qu’une vidéo ou une photo a été commandité par une marque.
Encore à ce jour, tous les créateurs de contenu ne le font pas. Je ne pense pas que c’est omis par mauvaise foi, mais davantage par méconnaissance de la loi », précise-t-elle.
En plus d’agir à titre d’agent d’influenceurs (Andréanne Marquis de Womance, Martin Goyette, Charlotte Bouvier notamment), la fondatrice de Dass Much vient tout juste de lancer un service d’encadrement juridique pour les influenceurs.
Par mon travail, je veux redonner des lettres de noblesse au domaine du marketing d’influence», conclut-elle avec enthousiasme.
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