« Capacitisme » et « validisme » : de nouveaux mots pour décrire une réalité qui perdure

8 avril 2025
En décembre dernier, la firme KPMG a publié un sondage venant rappeler combien il est difficile pour les personnes handicapées de mener une vie professionnelle épanouie. Ce faisant, le communiqué introduit un vocabulaire qui éclaire cette réalité sous un angle différent, en parlant de « capacitisme », de «validisme» et de « sous-emploi » des personnes ayant une « limitation ». Nous avons voulu mieux comprendre le sens de ces mots, en discutant avec Kim Auclair, consultante en relation de presse, qui milite activement pour l’intégration des personnes handicapées au marché du travail.
Prenons d’abord la mesure de la situation, d’après le coup de sonde de KPMG :
- 60 % des personnes ayant des limitations se sentent « sous-employés », ce qui fait référence au fait de ne pas utiliser « pleinement leurs compétences » au travail;
- 44 % ont été victime de « capacitisme » ou de «validisme», ce qui renvoie à « des attitudes et à des actions qui dévalorisent et limitent le potentiel et l’inclusion des personnes ayant une limitation ».
À l’origine, les mots « capacitisme » ou «validisme» sont des traductions du concept anglophone «ableism» qui s’oppose à la désignation «disabled». Selon une analyse de la revue européenne Alter, la Québec aurait opté pour la traduction «capacitisme», alors que la France aurait choisi «validisme», que Le Robert définit comme un «système faisant des personnes valides la norme sociale». Sauf que, en visitant le site de l’Ordre des CRHA, on ne trouve aucune occurrence de ces termes, dans des articles sur l’intégration des personnes handicapées au travail.
Selon ses souvenirs, Kim Auclair place la résurgence du terme «capacitisme » autour de 2018.
Le capacitisme, c’est une discrimination ou un préjugé envers les personnes en situation de handicap, nous explique-t-elle. C’est de penser tout de suite – sans valider ou prendre le temps de discuter – qu’une personne avec un handicap invisible ou visible est moins capable d’accomplir certaines tâches. »
L’auteure du balado Capable : entreprendre sans limites donne un exemple simple : présumer qu’une personne qui a une surdité ne peut pas faire de service à la clientèle, alors que la chose est possible, si l’employeur accepte d’adapter l’environnement de la personne. Le «sous-emploi», lui, renvoie à la dynamique malsaine où un employeur nivelle vers le bas l’idée qu’il se fait des compétences d’une personne handicapée.
Reprenons l’exemple d’une personne diplômée en communication qui se retrouve à un poste ou elle doit faire des tâches répétitives, du classement ou de la mise à jour de document, de la saisie de données ou la gestion de courriels, simplement parce que l’employeur considère qu’elle est plus à l’aise dans un rôle qui demande moins d’efforts. L’employé va sentir qu’il stagne dans son emploi – et ça limite son épanouissement. »
Trois bonnes pratiques à adopter
En conclusion, Kim Auclair revient sur quelques-unes des bonnes pratiques à adopter pour ouvrir pleinement les portes aux travailleurs qui ont des limitations, afin, bien sûr, qu’ils et elles atteignent leur plein potentiel professionnel :
1- Évaluer les compétences de façon objective
Surtout quand la personne prend la peine de mentionner son handicap invisible ou certains défis qu’elle peut avoir avec des tâches, il doit y avoir une ouverture à s’adapter. »
2- Offrir des occasions d’avancement
Les employeurs doivent donner accès à des projets qui ont de la valeur, avec les ajustements nécessaires au besoin, pour leur permettre de prouver ce qu’elles peuvent faire. »
3- Faire de la sensibilisation en interne
Ça peut commencer par engager une personne avec une situation de handicap et l’impliquer dans les processus d’embauche ou révision de certaines façons de faire à l’interne comme l’inclure dans les décisions, dans des projets de campagne, etc. »
Les entreprises n’ont plus d’excuses pour poser des actions concrètes.
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