Agence de publicité ou agence de relations publiques ? Une conversation à l’IABC/Montréal
Un jour, Jean-Claude Gassée, ancien cadre chez Apple, a dit: « La publicité, c’est affirmer qu’on est bon. Les relations publiques, c’est faire en sorte que quelqu’un d’autre dise qu’on est bon ».
Cette citation traduit-elle encore vraiment la réalité des communications d’aujourd’hui ? L’IABC/Montréal a posé la question à Annie Aubert, présidente de kbs+ Montréal et à Guy Litalien, conseiller principal chez Zone Franche, à l’occasion de son dernier événement de la saison, le 21 mai dernier. Condensé de leurs réponses en 4 points.Â
1. Médias payés vs médias mérités : une notion plus vraiment d’actualité
La croyance qui veut qu’agences de publicité et de relations s’opposent sur le principe «médias payés vs médias mérités» est, selon les deux conférenciers, aujourd’hui désuète.
En effet, comme le souligne Annie Aubert, les agences de publicité ont évolué, élargissant de plus en plus leur offre de services pour mieux répondre à la demande des clients: « aujourd’hui, les agences de publicité comptent en leur sein de personnes habilitées à oeuvrer pour des communications numériques, télévisées, radiophoniques ou imprimées. Certaines spécialités, comme par exemple les relations publiques, requièrent des compétences particulières et peuvent donc ne pas être représentées dans toutes les agences, mais globalement, toutes les plateformes font désormais partie d’une offre intégrée».
«La citation de M. Gassée date d’une période où l’on fonctionnait en silo, confirme Guy Litalien. Aujourd’hui on a plutôt intérêt à travailler en symbiose, et si on le ne fait pas, nos clients nous ramèneront à la réalité! Ils attendent de nous que nous soyons des générateurs de contenus. Si leurs demandes vont au-delà de notre champ d’expertise, à nous de travailler sur un mode collaboratif avec une agence qui aura les compétences nécessaires. On ne peut pas rester cantonnés à notre seul savoir-faire: une pratique en solo est une mauvaise pratique, dans nos métiers».
2. Il n’y a pas un spécialiste de contenus, mais plusieurs
Annie Aubert et Guy Litalien s’accordent pour dire qu’il existe autant de type d’agences qu’il existe de types de clients. Certaines agences proposent une offre globale, intégrée, quand d’autres se concentrent sur leur coeur de métier et laissent le soin à des agences spécialisées de combler leurs expertises manquantes. Côté client, c’est pareil : certains aiment avoir toutes les forces vives regroupées au même endroit, et d’autres changent d’agences selon la discipline.
«Il n’y pas de chasse gardée: s’il est vrai que les agences de relations publiques gèrent généralement les médias sociaux, notamment les stratégies de messages, les calendriers éditoriaux de publications etc., les agences de publicité ont désormais elles aussi des départements numériques qui s’approprient une partie de ces dépenses de communication. Il ne faut pas oublier non plus les firmes spécialisées en numérique, qui font également partie de la donne. Donc on se partage le marché, et c’est de bonne guerre car on fait les choses de façon différente. Des niches apparaissent naturellement dans certains domaines, comme par exemple les volets activation ou concours, qui sont plutôt du ressort des agences de publicité car il s’agit de l’extension d’une campagne», affirme Annie Aubert.
«Finalement, c’est un peu comme lorsque l’on joue au cartes: il faut toujours jouer dans l’atout», ajoute Guy Litalien, avant d’ajouter qu’il est désormais impossible d’aborder la publicité ou les relations publiques de la même façon qu’auparavant: «ces dernières années, l’industrie médiatique a vécu d’importantes transformations, et ce n’est pas fini. Nos agences doivent s’adapter et évoluer avec les entreprises».
3. Les clients sont de plus en plus experts en communication
Pour les deux conférenciers, la définition d’une stratégie dépend majoritairement de la façon dont est structurée l’entreprise, et de sa façon d’appréhender les communications. Mais d’une manière générale, nos deux professionnels ont constaté que les nouvelles générations de dirigeants sont plus au fait de l’importance de la communication pour leur firme que leurs aînés, et en maîtrisent également mieux les rouages.Â
«Lorsque j’ai commencé à travailler, déclare Guy Litalien, il n’y avait pas de Bac en communications. Notre industrie a changé: on sent aujourd’hui que la gestion des réputations est une préoccupation des dirigeants, et qu’il y a une réelle expertise en communication dans les organisations.»
4. Comprendre le contexte dans lequel évolue le client, une condition sine qua non pour toute agence
Selon Annie Aubert, une agence de publicité a besoin pour briller de « penseurs, de planificateurs stratégiques, de conseillers capables d’orchestrer les projets, de créatifs, dont la mission est désormais de trouver une grande idée déclinable sur de nombreuses plateformes, de gens habiles en technologies numériques, d’autres personnes en production, qui connaissent les nouvelles technologies… Mais ce qu’il faut avant tout, c’est être curieux, à l’affût des nouvelles tendances. Et surtout, être capable de comprendre les enjeux de ses clients pour pouvoir les conseiller au mieux, tout en passant d’un sujet et d’un client à un autre tout au long de la journée.»
Côté relations publiques, Guy Litalien estime qu’il faut «encore être bon sur le clavier! La rédaction est fondamentale, il faut aimer ça. Il faut aussi comprendre l’écosystème de l’organisation, son fonctionnement, ses attentes, ses enjeux d’affaires et de communication. Pour être bon en agence de relations publiques, il faut avoir des lectures sérieuses et développer un certain sens politique, car c’est là -dessus que l’on se démarquera.»
Photo: Mélanie Dusseault Photographe.Â