La reconnaissance est-elle une drogue?
Jacques Forest et Jean-Paul Richard répondaient à la question ce 12 septembre 2017 dans le cadre de l’événement Illico Hodes. À travers leur conférence De l’importance de la connaissance, ils traçaient le parallèle entre le besoin d’appréciation des athlètes et celui de tous les travailleurs.
12 septembre 2017
Dans reconnaissance, il y a le mot connaissance», lançait d’emblée Jacques Forest, PH, CRHA, psychologue, professeur, chercheur à l’ESG UQAM ainsi que conférencier et psychologue pour ReROOT.
Lorsqu’on travaille avec des athlètes de haute qualité, leur donner de la reconnaissance est primordial pour leur permettre d’atteindre leur plus haut potentiel», complétait Jean-Paul Richard, entraîneur, médaillé olympique, chef du programme de formation du Cirque du Soleil et cofondateur de ReROOT.
Le besoin fondamental de légitimation s’avère universel. Le plan d’action qu’ils ont mis en place avec les soeurs Dufour-Lapointe lors des Olympiques de 2014 s’applique donc aussi aux professionnels de tous les secteurs.
Si l’ensemble des humains réclament la reconnaissance, chacun la satisfait toutefois différemment.
Voilà pourquoi celui qui se trouve en position hiérarchique gagne à parler son langage. Les trois clés suivantes lui permettront de s’y exercer.
1. Connaître et susciter une bonne motivation
Parmi les moteurs de l’homme, on compte le «plaisir» et le «sens» (l’utilité).
En tant qu’entraîneur, Jean-Paul Richard rappelle donc sans cesse aux athlètes pourquoi ils s’engagent dans le processus olympique. Il insiste sur le fait que leur mission a une raison, une utilité.
Cela reste primordial, car le plaisir n’est pas toujours évident lorsque les conditions deviennent difficiles.
Mais, en ramenant la notion de sens, on le retrouve. «Plaisir» et «sens» vont de pair.
Lorsqu’un employé cesse de trouver sa tâche agréable, il ne perçoit plus de bonnes raisons de s’investir.
À l’inverse, s’il constate qu’il est utile et heureux, il a davantage d’énergie, de concentration et entreprend plus d’actions positives.
2. Satisfaire le besoin universel de manière individuelle
Oubliez la pyramide de Maslow, c’est dépassé, les gens ont trois besoins psychologiques innés», lançait Jacques Forest.
Premièrement, ils veulent atteindre l’autonomie. Ils souhaitent agir selon leur système de valeurs, à l’intérieur de leurs propres règles et limites. Même s’ils obéissent à des ordres, ils doivent sentir qu’ils ont une marge de manoeuvre et qu’ils prennent des décisions.
Deuxièmement, l’humain tend à vouloir refléter la compétence. Il est né pour relever des défis, surmonter des obstacles et atteindre des objectifs.
Finalement, tout le monde réclame l’affiliation sociale. On veut tous être aimé et avoir un sentiment d’appartenance.
Jean-Paul Richard s’en est rendu compte avec les soeurs Dufour-Lapointe:
J’ai vite constaté qu’en séparant les trois soeurs leur besoin d’affiliation sociale n’était plus comblé. On les a donc réunies dans un même condo lors des compétitions. Alors, elles ont retrouvé leur sentiment d’appartenance. Un aussi petit détail peut donc faire beaucoup.»
En offrant ces trois véritables «vitamines sociales» de manière adaptée, un supérieur nourrit ses troupes à la reconnaissance. Il les empêche aussi de se rabattre sur des récompenses négatives comme le mensonge, la tricherie, le vol (en temps ou en argent), etc.
3. Le bon comportement par la bonne personne au bon moment
Une bonne façon pour l’entraîneur ou le gestionnaire d’aiguiller ses protégés réside dans le fait d’en apprendre davantage sur eux.
Toutes les plantes ont besoin de soleil et d’eau, les cactus aussi, mais pas dans les mêmes proportions», affirmaient les deux orateurs.
Pour reconnaître, il faut donc connaître.
Dans son plan d’entraînement, Jean-Paul Richard inclut même des séances de magasinage. Il sait que, pour les filles de l’équipe olympique, c’est un incontournable qui détend l’atmosphère et permet de tisser des liens.
Outre le fait d’organiser des réunions d’équipe et des activités sociales, les travailleurs peuvent rendre l’invisible visible en mettant de l’avant différentes valeurs dans leur milieu:
- Respect
- Ouverture
- Tolérance
- Confiance
- Esprit d’équipe
- Concentration
- Émotions
- Motivation
- Résistance mentale
Oui, la reconnaissance est une drogue. Mais, elle peut être positive ou négative. Il n’en tient qu’à vous de mettre les mesures en place pour qu’elle soit satisfaite de la bonne façon.