Le Québec et les startups: miser sur nos forces
Par Olivier Lefebvre
26 août 2014 – Une recherche récente de la Washington State University College of Business classe le Canada dans les cinq pays les plus performants au monde pour les startups. Trois villes canadiennes, soit Vancouver, Toronto et Waterloo, sont parmi les vingt villes abritant les meilleurs écosystèmes pour les entreprises techno en démarrage. Le point avec deux experts montréalais dans le domaine: Sylvain Carle et Philippe Telio.
Le Canada se démarque, donc, pour son coût de la vie abordable, son taux de scolarisation élevé et sa stabilité économique. Sylvain Carle, directeur général de l’accélérateur d’entreprises basé à Montréal FounderFuel, se réjouit que les écosystèmes de startups soient maintenant considérés par les investisseurs au-delà du seul indicateur de performance qu’est le produit intérieur brut (PIB). «L’économie du savoir positionne de plus en plus le Canada comme pays d’innovations et de technologies plutôt que de ressources naturelles», s’enthousiasme-t-il.
Bien sûr, certaines régions du pays sont plus propices que d’autres au démarrage d’entreprises. Se fier à un classement de pays est un peu nébuleux pour Philippe Telio, fondateur du International Startup Festival de Montréal. Il vaut mieux s’intéresser spécifiquement aux villes, selon lui. Les environnements urbains à forte densité, là où se trouvent les universités, sont des écosystèmes plus favorables aux startups, renchérit Sylvain Carle. Ces grands axes urbains demeurent évidemment Vancouver, Toronto et Montréal.
Le défi, selon M. Carle, est de bâtir une économie qui soutient les startups. Les universités devraient conséquemment être désignées davantage comme point d’ancrage pour ces écosystèmes, justement. «Les États-Unis ont, encore aujourd’hui, une importante longueur d’avance avec la Silicon Valley qui s’est développée aux côtés de l’Université Stanford, illustre-t-il. Il ne faudrait pas se péter les bretelles tout de suite!»
Attirer les regards internationaux
La croyance populaire voulant que les Québécois soient nés pour un petit pain et ne représenteraient pas, conséquemment, un peuple d’entrepreneurs est de plus en plus démentie selon Sylvain Carle. Le taux d’entrepreneuriat, dit-il, est équivalent à la grandeur du pays. «Bien sûr, le Québec a ses défis, ses lois particulières et la caractéristique d’avoir, en son sein, une métropole bilingue», ajoute Philippe Telio.
C’est pourquoi Montréal a toujours un petit peu plus de difficulté à attirer les plus grands talents du monde (barrière de la langue française avec le reste du continent qui est anglophone. NDLR). L’International Startup Festival existe en partie pour cette raison. «C’est un événement international qui offre aux entrepreneurEs locaux une belle occasion de s’inspirer et d’apprendre sur ce qui se fait ailleurs dans le monde», précise-t-il. Selon ses estimations, 50% des personnes présentes au festival cette année étaient québécoises. Même proportion du côté des startups inscrites. «Une occasion de faire des rencontres pour attirer des investisseurs à Montréal», précise Sylvain Carle.
S’arrimer aux forces québécoises
Si le Québec se distingue du reste du Canada sur plusieurs aspects socio-économoiques, la question stratégique se pose alors: vers quels domaines le Québec devrait-il alors concentrer ses efforts pour tirer son épingle du jeu? Philippe Telio mise d’abord sur le culturel et multilingue, à l’image de Montréal, mais pas exclusivement. Les biotechnologies ne peuvent pas être négliées non plus, tout comme le commerce électronique où des gros joueurs comme Beyond the Rack et la boutique en ligne de vêtements pour hommes Frank and Oak ont émergé dans les dernières années.
Une vision partagée par Sylvain Carle qui croit, de son côté, que les entrepreneurs québécois devraient avant tout se concentrer sur les forces existantes dans la Belle province. Notamment dans le secteur de l’alimentation où l’exemple de Provender a permis de créer, grâce à son application novatrice, un lien direct entre les agriculteurs locaux et les chefs de restaurants.
Un autre secteur fort au Québec, celui de l’énergie, n’a pas encore été pris d’assaut par les startups. «Je suis surpris que ce ne soit pas encore exploité, termine Sylvain Carle. Le Québec devrait être un leader mondial là-dedans!»