Le Full Data, plus efficace que le Big Data!
Par Olivier Lefebvre
Connaître sa clientèle pour lui offrir la meilleure expérience possible…en peu de temps. Un défi de taille! Pourtant, il a été relevé par le duo formé de Catherine Bourbeau, anthropologue numérique chez TELUS, et Marie-Nathalie Poirier, jusqu’à tout récemment stratège numérique pour la même boîte. Leur innovation est une méthode de recherche baptisée Full Data et dont toute la pertinence a récemment été exposée à Boomerang la conférence.
Impossible de passer sous silence le Big Data lorsqu’il est question de Full Data. Plus à la mode, le Big Data consiste en une collecte massive de données d’utilisateurs à partir d’une multitude de sources. Ces données sont ensuite analysées par des programmes informatiques. Selon l’anthropologue, bien que le terme soit en vogue dans le milieu, il s’agit d’une pratique bien peu répandue au Québec.
Le terme Full Data, choisit par celle-ci, se veut d’ailleurs un clin d’oeil ironique à sa surutilisation. «C’est bien beau le Big Data, insiste-t-elle, mais ça ne donne pas le Full Picture», un portrait d’ensemble. «Ça donne un squelette, mais ça ne nous dit pas pourquoi ça se passe comme ça, il n’y a pas de chair autour de l’os, c’est donc difficile d’innover», fait savoir Catherine Bourbeau.
Le Full Data propose plutôt un portrait humain qui résulte de méthodes de recherches choisies avec diligence. Cela, en gardant en tête l’agencement des données les unes aux autres afin de maximiser les résultats et garantir la validité.
L’être humain existe encore
Le Full Data, c’est la conjugaison entre les données quantitatives et qualitatives recueillies pour qu’elles se nourrissent mutuellement afin d’atteindre, au final, un meilleur portrait de la réalité. «C’est bien beau de voir où les gens cliquent sur le web ou interagissent avec une interface, mais il faut étudier le reste du contexte dans lequel les gens vont l’utiliser», précise Catherine Bourbeau.
L’anthropologue insiste encore une fois sur le côté humain de l’individu. «Ce que je prétends, dit-elle, c’est qu’il faut effectivement considérer l’individu à travers toutes ses dimensions: pas seulement comme un segment de marché, utilisateur d’une interface ou un abonné d’une page Facebook, mais comme un tout qu’il faut étudier». Ainsi, au lieu d’organiser des groupes «focus», Catherine Bourbeau prône l’idéation qui consiste a faire participer les gens dans le processus de création.
Le Full Data en 4 étapes
À l’occasion de la conférence Boomerang, les deux expertes ont résumé le Full Data en 4 étapes distinctes.
- La mise en place d’une équipe pluridisciplinaire
- Le paramétrage de la recherche selon la nature du projet, le temps et le budget
- La sélection des sources de données qualitatives et quantitatives
- L’étude de l’entreprise, de la marque, de la compétition et des consommateurs
Le temps, c’est de l’argent!
Par souci de résultats ou d’économie de temps, les entreprises ont parfois tendance à laisser tomber l’étape de recherche avant de mettre en marché un produit ou un service. La priorité se dirige plutôt vers le design de produit en faisant confiance à l’instinct du designer.
Pour ces compagnies, le Full Data peut être perçu comme une perte de temps, mais «quand on entre dans la création, après, on s’en va plus rapidement et plus efficacement dans la bonne direction. On sauve alors de l’argent en aval», assure Catherine Bourbeau. «L’idée dans tout ça, c’est de connaître le consommateur en tant qu’être humain avec le moins de temps et d’argent possible», résume-t-elle.
Pour obtenir les meilleurs résultats possibles, Catherine Bourbeau fait valoir que les équipes doivent travailler en étroite collaboration les unes avec les autres. Par exemple, il est important que les données recueillies par le département du web – qui étudie les gens comme un utilisateur – soient partagées par la section marketing qui s’intéresse plutôt aux segments. Aussi farfelu que cela puisse paraître, «il n’y a personne qui fait des parallèles entre ces modes de recherche spécifiques pour le moment», assure l’anthropologue.
Une recherche en mode Full Data, finalement, ne monopolise pas forcément beaucoup d’employés. Catherine Bourbeau et Marie-Nathalie Poirier étaient deux spécialistes attitrées à ce projet chez Telus. «On a pas besoin de huit départements de quatre personnes», croit Catherine Bourbeau, pourvu que l’analyse des données qualitatives soit assurée par un expert. Elle estime d’ailleurs qu’une recherche Full Data peut se compléter dans un délai allant de 3 semaines à trois mois.