Neutralité du net: les craintes s’accumulent au FCC
Par Christian Bolduc
24 juillet 2014 – L’organisme à l’origine d’un projet de loi qui introduirait le principe d’un accès à deux vitesses pour les usagers d’Internet, le Federal Communications Commission (FCC) des États-Unis d’Amérique, vient de recevoir un nombre record de commentaires de la part de citoyens pour la plupart inquiets qu’une possible discrimination puisse affecter leurs droits.
Organisme censé défendre l’intérêt public mais historiquement inféodé aux intérêts des corporations médiatiques, le FCC a recensé 1,067,779 commentaires dont une vaste majorité s’oppose à la fin de la neutralité du net telle qu’on la connait aujourd’hui.
Mais dans les faits, l’accès différencié à Internet, comme nous le rappelait récemment le professeur à l’École des médias de l’Université du Québec à Montréal, Jean-Hugues Roy, est déjà une réalité économique: « si plusieurs usagers paient aujourd’hui davantage pour avoir l’Internet haute vitesse, d’autres, qui n’ont pas ces moyens (ou refusent de payer), doivent généralement se contenter d’un accès plus lent. »
Une autre inquiétude des opposants à ce projet déposé par le président du conseil d’administration de la FCC, Tom Wheeler est l’arbitraire, la discrimination et la censure que pourraient dorénavant exercer les fournisseurs d’Internet sur les contenus diffusés à travers leurs canaux de communication.
Lui-même très préoccupé par ce possible transfert de responsabilités anti-démocratiques vers le secteur privé, le sénateur démocrate du Vermont, Bernie Sanders, est aux premières loges dans cette bataille. Isarta Infos, après plusieurs tentatives, a finalement réussi à lui parler au téléphone en début de semaine afin d’obtenir des précisions sur cette notion d’égalité qu’il défend.
Pour les citoyens et les entreprises (PME) dont les moyens financiers sont restreints, la neutralité du net est le principe par lequel il est possible de mieux protéger leurs droits à l’égalité et à la liberté. »
Notamment la liberté d’expression – le droit à la dissidence et le droit de l’exprimer – mais également la capacité de lancer, développer et financer son entreprise sans devoir subir l’arbitraire d’un fournisseur Internet qui décide, par intérêt – éliminer ou étouffer financièrement un concurrent potentiel – ou par idéologie, de bloquer ou retirer du contenu qu’il juge incompatible avec ses orientations politiques et/ou économiques.
Faut-il craindre, ici au Canada, les répercussions d’une telle loi si elle est appliquée aux États-Unis? Il semble que le gouvernement conservateur de Stephen Harper, très proche idéologiquement des États-Unis en matière économique (libre marché sans entraves, rôle réduit du gouvernement quant aux réglementations, proximité avec la grande bourgeoisie d’affaires, etc.), soit déjà à l’oeuvre pour imiter le géant étasunien.
« Une chose est certaine, disait le sénateur Sanders en terminant, il est indécent de laisser aux fournisseurs d’Internet la responsabilité finale quant la sélection des contenus qui seront diffusés (ou pas). »