Est-on vraiment plus productif quand on planifie son temps « par blocs » ?
2 juin 2022
À une époque où tout le monde a l’impression de « courir après son temps », les conseils de productivité s’adressant aux cols blancs abondent sur Internet. Matrice d’Eisenhower, « timeboxing » et autres techniques de planification optimisée sont vantées par les consultants en psychologie organisationnelle. Or, une étude effectuée en 2018 à l’université Ohio State montre les limites de la planification à outrance.
Les vertus de la planification sont évidentes : planifier méticuleusement ses jours et ses semaines permet de réfléchir à la direction que l’on veut prendre comme entrepreneur ou professionnel. Ensuite, ça donne l’occasion d’évaluer le temps que prend vraiment une tâche et de mesurer notre progression globale.
C’est aussi dans l’air du temps. Gérer son horaire de manière serrée et compartimentée est vanté par plusieurs leaders; on n’a qu’à penser à Elon Musk et Bill Gates qui sont réputées pour remplir leur agenda d’une succession de tâches de quelques minutes.
En 2018, un article du Harvard Business Review sur le « timeboxing » a fait grand bruit dans les médias. L’auteur Marc Zao-Sanders disait être au moins deux fois plus productif depuis qu’il avait abandonné le concept de « to-do list » pour adopter une « gestion par blocs de temps ». (Il s’inspirait alors d’une approche mise de l’avant par Daniel Markovitz dans la même revue; celui-ci invitait les professionnels à « vivre dans leur agenda ».)
La même année, un groupe de recherche de l’université Ohio State lançait un pavé dans la marre des mordus de la planification en publiant une étude intitulée When an Hour Feels Shorter (Traduction libre : « Quand une heure semble plus courte »). Selon les résultats de huit expériences menées dans cette étude, il s’avère qu’on ne peut découper l’horaire comme un saucisson et espérer être également productif dans chaque tranche de temps.
Moins de concentration avant une réunion
La professeure de marketing Selin Malkoc a conduit différents tests pour vérifier comment nous gérons le temps qui précède un rendez-vous. Parmi les expériences, Malkoc et son groupe de recherche ont comparé la productivité d’un groupe de participants ayant « 5 minutes de libres » versus « 5 minutes avant le début d’une activité » – le premier groupe étant plus productif que le second.
À un autre moment, les participants devaient choisir entre une tâche de 30 minutes rémunérée 2,50$ ou une tâche de 45 minutes rémunérée 5$, dans un contexte où le groupe A avait un rendez-vous «dans l’heure suivante» et le groupe B n’avait pas de rendez-vous. Le groupe A, sentant coincé dans le temps, a préféré la tâche plus courte mais moins payante, alors que le groupe B s’est senti à l’aise d’attaquer la tâche la plus longue.
Les chercheurs en ont conclu que la composition de l’horaire influence notre perception du temps.
Lorsqu’une rencontre approche, explique ici Selin Malkoc, nous dirigeons notre attention vers celle-ci, soit en l’appréhendant ou en nous y préparant mentalement. Cela rend le rendez-vous à venir plus concret. Par conséquent, intervalle de temps qui mène au rendez-vous donne l’impression d’être limité et insuffisant [pour accomplir une autre tâche]. »
En conclusion, Selin Malkoc donne ce conseil :
Si vous aimez planifier vos journées, un conseil serait de planifier des événements ou des tâches successivement [« back to back »], ce qui laisse ensuite de larges plages de temps non planifié. Ces heures non planifiées donneront l’impression d’être plus longues, surtout lorsque rien n’est prévu par la suite. »
On prend note!
*L’article donne suite à un premier article sur le risque de la planification «abusive», publié plus tôt dans le mois.
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