Aux États-Unis, les sites de nouvelles en pleine confusion
Par François Nadeau
En juillet dernier, on apprenait que le Journal de Montréal mettait de l’avant des procédures dans le but de faire cesser les activités du site satirique Journal de Mourréal.
Selon eux, il existe «un risque probant de confusion entre le Journal de Montréal et le Journal de Mourréal», notamment pour «le consommateur ordinaire plutôt pressé».
À la lumière des commentaires rédigés suite à la parution des articles, on constate effectivement que plusieurs lecteurs se font prendre, et ce malgré des titres aussi ridicules que Interdiction des chiens dangereux: la SQ embauchera des chihuahuas.
Si des sites comme Journal de Mourréal ou Actualité.co peuvent être susceptibles de nous induire en erreur, ce n’est rien par rapport à la confusion à laquelle sont exposés nos voisins du sud.
Une ligne de plus en plus floue entre le vrai et le faux
Comme nous, les Américains possèdent leurs sites de nouvelles satiriques. Créé en 1988, The Onion en est peut-être le meilleur exemple.
Avec le temps, des dizaines d’autres sites du genre ont été créés, dont plusieurs dans les dernières années.  Comme le Journal de Mourréal, ils font chacun des victimes, mais tout comme lui, en étant moindrement attentif, le lecteur peut assez facilement se rende compte de l’aspect satirique de la chose.
Toutefois, s’ajoute maintenant à eux une multitude de sites où rien n’indique clairement  s’il s’agit ou non de fausses nouvelles.
Fréquemment voués à la promotion d’idées politiques, ces sites s’inspirent régulièrement de sources et de faits réels afin de créer des histoires peu ou pas du tout crédibles. Les titres n’ont souvent rien de drôle ou d’absurde, tout comme les textes qui s’ensuivent. Sur ces plateformes, de vraies nouvelles apparaissent au travers d’autres qui sont partiellement ou totalement fausses. Il suffit d’en consulter quelques-unes pour se rendre compte à quel point on joue entre le vrai et le faux, bien souvent pour faire mal paraître des groupes ou des opposants politiques.
La confusion devient toutefois encore plus grande lorsque ces articles se propagent à travers la toile.
Prenons l’exemple de cette fausse nouvelle selon laquelle Barrack Obama aurait déclaré qu’il déménagerait au Canada si Donald Trump était élu. À l’origine, l’information été publiée sur The Burrard Street Journal (un site canadien cette fois-ci), qui s’identifie clairement comme un site satirique. Toutefois, elle a ensuite été reprise ailleurs.
Sans identifier d’où provient l’information, des passages de la nouvelle de The Burrard Street Journal sont repris ici. Pour compliquer l’affaire, on mélange le tout avec les résultats d’un vrai sondage de la firme Ipsos concernant l’intention de certains Américains de déménager au Canada dans l’éventualité où Donald Trump serait élu.
Pour compliquer encore davantage les choses, on apprenait récemment que Facebook aurait, par mégarde, propulsé certaines de ces fausses nouvelles à l’avant-plan en modifiant sa façon de gérer les articles «tendances».
Alors que des chaînes de nouvelles, des personnalités publiques et des politiciens n’hésitent pas à mettre en doute la crédibilité des médias, que plusieurs ne lisent pas ou peu avant de partager un texte, on comprend mieux le peu de confiance que les Américains accordent à ceux-ci.
En 2015, seulement 40% des Américains affirmaient faire confiance aux médias, un creux inégalé depuis vingt ans. Ce pourcentage était encore plus bas chez les 18-49 ans (36%) ou encore chez les électeurs républicains (32%).