L’évolution des métiers du numérique au Québec, entre la théorie et la pratique
Par Christian Bolduc
23 mai 2014 – L’univers des métiers et professions du numérique a ceci de fascinant qu’il se déploie dans un monde totalement immatériel. Insaisissable par nature mais bien réelle au quotidien, l’économie du numérique demeure par ailleurs, encore aujourd’hui, une réalité à appréhender autant par le milieu de l’éducation que par le marché du travail lui-même.
Afin de contribuer à une meilleure compréhension de son évolution, une enseignante aux HEC-Montréal et une praticienne spécialisée en recrutement numérique chez Drakkar ont uni leurs efforts pour produire une synthèse éclairante en ce qui a trait au développement des spécialités dans cette industrie dont les qualités et compétences, finalement, sont encore à circonscrire.
L’idée de marier la théorie de Camille Grange à la pratique de Marie-Hélène Cloutier est d’autant plus judicieuse que la main-d’oeuvre associée au numérique évolue à la vitesse grand V depuis quelques années et nécessite, conséquemment, un dialogue constant entre ces deux sphères complémentaires.
En s’appuyant sur un sondage réalisé auprès de 2000 professionnels triés sur le volet par le Research for Digital Domination Summit 2012, les deux conférencières tentaient de répondre aux questions suivantes: quelles sont les qualités et compétences recherchées dans la main-d’oeuvre numérique? Quels métiers et quels savoir-faire sont et seront requis? Quels types de professionnels auront-ils besoin? Quelles formations devront être dispensées afin de répondre aux besoins de cette évolution?
État des lieux
Autant de questions qui reflètent une réalité quantifiée d’emblée par Mme Cloutier: «si 85% des professionnels interrogés affirment que les technologies (comme outil de travail ou compétences centrales associées à leur réalité professionnelle) ont un impact direct sur leur travail, seuls 21% d’entre eux disent posséder les compétences requises pour bien l’effectuer au quotidien.»
«Des carences avec lesquelles il faut dorénavant vivre dans plusieurs organisations alors que la «division» commerce électronique de l’entreprise, aux prises avec des pressions associées à sa dynamique particulière – innovation constante et tentaculaire à fournir, capacité (leadership) à arrimer ses compétences aux différents départements de l’organisation – tend à aspirer une quantité croissante de compétences croisées vers elle.
Autrefois séparées, les compétences en commerce électronique doivent dorénavant être mieux et davantage soudées les unes aux autres. Nommés profils hybrides, ces emplois associés au numérique prennent donc de l’expansion et doivent, conséquemment, s’adapter à la volatilité des compétences technologiques. C’est-à-dire accepter que les compétences recherchées d’aujourd’hui pourraient être obsolètes ou caduques dans un an, et prévoir les façons de s’adapter sans prendre (trop) de retard.
Quatre spécialités
Mais il est alors impératif, avant de régler les problèmes de compétences et de formations, de bien identifier les champs d’expertise pertinents aux affaires électroniques au sein de l’organisation. Au nombre de quatre, ces spécialités professionnelles sont les suivantes:
- Marketing et communication*: spécialisation dont le mandat est de faire aimer et connaître la marque aux clients, les fidéliser, les engager envers la marque, les convertir, mieux les connaître et apprendre d’eux;
- Contenus numériques*: en créant des contenus à haute valeur ajoutée, ces spécialistes veillent à la valorisation, diffusion, conservation, optimisation et protection de la marque sur les différentes plateformes privilégiées pour la faire vivre et croître;
- Interfaces numériques*: cadre d’emploi technologique, le spécialiste en TI a pour mission de «livrer les contenus de manière fiable et efficace par l’intermédiaire de plateformes et d’interfaces adaptées et performantes;»
- Logistique et l’approvisionnement*: arrivant à la fin de la chaîne logistique, justement, ce spécialiste a pour finalité de déplacer vos produits et/ou services, les distribuer, gérer les retours et d’arrimer le canal des ventes numériques aux autres départements de l’organisation.
Quatre méta-compétences
«Bien identifiées, les catégories d’emplois peuvent alors permettre aux leaders de mieux circonscrire les compétences dominantes qu’un individu doit maîtriser s’il veut maximiser son potentiel professionnel,» précise professeure Grange.
Divisées en quatre grappes d’habiletés, les méta-compétences suivantes permettent d’obtenir des profils types très détaillés:
- Utilisateurs: comprendre les motivations, les habiletés et les comportements des utilisateurs afin de maximiser le niveau de performance des actions posées. Professeure Grange, pour faire image, suggère un profil qui se rapproche du praticien en psychologue et en neuro-psychologie.
- Marché: posséder un savoir et une compréhension des comportements associés aux consommateurs, aux produits ainsi qu’au marché. Notamment la compétition et l’industrie dans laquelle ce spécialiste évolue.
- Affaires: compétences qui touchent le fonctionnement interne de l’organisation, sa gouvernance, ses processus de décision, sa culture organisationnelle et sa dynamique de développement.
- Technologies: avoir une connaissance suffisante – et le jugement requis – pour proposer les bonnes plateformes pour les utilisateurs, c’est-à-dire avoir une dimension pratique (application), donc de la valeur ajoutée, et pouvoir intégrer/développer les infrastructures technologiques qui supportent les interfaces.
On a, enfin, associé des méta-compétences à chacune des spécialités d’emploi précédemment identifiées. Les voici:
Marketing et communication: Marché, Technologies.
Contenus numériques: Utilisateurs, Technologies, Marché, Affaires.
Interfaces numériques: Utilisateurs, Technologies.
Logistique et approvisionnement: Affaires et Technologies.
Avec ces outils, le gestionnaire en commerce numérique pourra mieux orienter son recrutement, les formations à proposer et les profils types qui pourront aider l’organisation dans sa capacité à intégrer les contingences de cette nouvelle branche organisationnelle.
*Les emplois identifiés par spécialité dans l’univers de l’économie numérique au Québec:
Marketing et communication |
Contenus numériques |
Interfaces numériques |
Logistique |
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