Échos de C2 Montreal 2023 : l’IA, arme de création massive

*«Comment spécifiquement devrions-nous faire équipe avec l’IA pour rendre l’impossible possible», a demandé* *Rei Inamoto, fondateur de la firme I&CO, à C2 Montréal*

7 juin 2023

Sur la scène baignée de lumière du 21^e étage de l’hôtel Fairmont Le Reine Elizabeth, le créatif new-yorkais Rei Inamoto, fondateur de la firme I&CO, a livré sa vision de ce que l’intelligence artificielle peut apporter à l’industrie publicitaire. Retour sur la conférence Transformation de marque: évolution et créativité à l’ère de l’IA présenté le 26 mai dernier à C2 Montréal.

Après une mise en contexte historique visant à nous rappeler ce que l’imprimerie, la radio, la télévision, l’ordinateur et l’Internet avaient apporté à l’humanité… il est entré dans le vif du sujet : comment l’intelligence artificielle peut devenir un outil de création. Et sa perspective s’est avéré fort intéressante.

« Toute résistance est futile », annonce d’emblée le créatif publicitaire, pour cadrer la discussion. Après seulement quelques mois sur le marché, les différentes applications d’IA génératives produisent des contenus textuels, visuels, audio et vidéo d’une qualité telle que les artistes du pinceau et de la plume doivent se repositionner dans leur approche de la création.

Les gens n’ont plus besoin de s’entraîner pendant des années pour créer techniquement des images avancées et cela a augmenté la barre de ce qui est perçu comme une image de qualité moyenne. La mauvaise nouvelle est que, dorénavant, la médiocrité est gratuite. Des gens qui n’ont aucun talent artistique peuvent créer de très belles choses.»

Or, au lieu de combattre l’IA générative en argumentant que seul un œil humain peut rendre compte de la complexité de l’expérience humaine, Rei Inamoto suggère plutôt aux artistes et autres créateurs de contenu de s’approprier l’outil pour explorer et défricher de nouveaux territoires créatifs.

Un monde de possibilités

L’approche de Rei Inamoto est à la fois simple… et complexe. Il propose de regarder « comment l’IA peut devenir un partenaire pour rendre l’impossible possible ». Qu’est-ce que ça veut dire au juste ? Concrètement, celui qui figure dans le Top 25 des gens les plus créatifs selon Forbes a identifié trois nouveaux procédés créatifs rendus possibles par l’utilisation de l’intelligence artificielle. Et il a créé un acronyme pour évoquer chacun de ses procédés : le R.E.M., pour le « Reach» (la portée), «l’Efficience» et la «Magie».

Par la portée, Rei Inamoto entend le fait que l’IA générative peut prendre un contenu original et le décliner dans plusieurs langues en quelques étapes rapides. Le groupe Hybe en a démontré le potentiel en diffusant la chanson Mascarade de l’article MIDNATT dans six versions de langues différentes, dont la voix a été « synthétisé » à l’IA.

En lançant une chanson multilingue, le groupe Hybe [qui produit l’artiste] obtient pour ses articles une visibilité qui était inimaginable il y a quelques années seulement. »

L’efficience, elle, tombe sous le sens. Entre les mains d’artiste aguerri, les outils d’intelligence artificielle permettent de créer des « maquettes » ressemblant à s’y méprendre avec le résultat final, ce qui accélère incroyablement toutes les étapes de création et de production.

Rei Inamoto donne l’exemple d’une campagne ayant été imaginé par l’artiste Plum Lefebure, cofondateur de Design Army, en une fin de semaine, à partir de quelques « prompts » entrés dans l’application Midjourney. Et pas question de vendre l’oeuvre au rabais pour autant:

Les clients doivent payer [le plein prix de l’exécution], aurait déclaré Plum Lefebure à Rei Inamoto. Ce pourquoi ils vont payer, c’est mon oeil artistique, mon goût et mon talent basé sur des années d’expérience. Quand je donne un brief à de jeunes designer, les résultats ne sont pas aussi bons.»

Campagne de l’artiste visuel Plum Lefebure, cofondateur de Design Army

Et finalement, la touche « magique ». L’IA générative permet de créer des mondes et des effets visuels qui auraient pris – il y a quelques mois seulement – un budget astronomique et une équipe technique de haut vol. Or, il est aujourd’hui facile de décrire un « genre de personnage » et de le voir apparaître sous nos yeux.

Il est possible de faire interagir des personnes qui ne se sont jamais rencontrées (voir le deep fake de Joe Rogan discutant avec Justin Trudeau). Ou encore, comme l’amène Rei Inamoto, faire jouer un tennisman contre lui-même (!), dans cet affrontement surréaliste entre un jeune John McEnroe virtuel contre un vieux John McEnroe de 64 ans.