La communication non-verbale : « Notre corps ne nous trahit pas, il nous traduit ! »
Par Kévin Deniau
1er octobre 2024
Repérer les incohérences entre le verbal et le non-verbal. Tel est l’objectif de Manuel Constant, synergologue et fondateur du cabinet Syner-Go, dans une nouvelle formation sur la communication non-verbale. Entrevue.
Bonjour Manuel. Qu’est-ce qui vous a amené dans votre parcours à vous intéresser au non-verbal ?
Manuel Constant : J’ai une passion pour l’analyse comportementale et la compréhension de l’humain au sens large. Le noyau dur de ma formation académique tourne autour de la synergologie et le langage non-verbal.
Je reconnais qu’il y a des débats sur ce sujet mais j’ai une position nuancée et pondérée dans le milieu. Dit autrement, je suis anti-dogmatisme. Je me situe entre les deux extrêmes : d’une part, les personnes qui frisent le charlatanisme et, d’autre part, celles qui sont trop formatées avec un prisme pro-scientifique et qui n’y accordent aucune valeur.
Pour moi, l’analyse et la compréhension du langage non-verbal est un outil très utile. L’ignorer est aussi stupide que de s’assoir dessus en affirmant que c’est la vérité absolue. Des tendances comportementales existent et mon travail, c’est de les débusquer et de les tester concrètement sur le terrain. Puis d’enseigner celles qui marchent très bien.
Pourquoi l’apprentissage de notions de langage non-verbal peut avoir un intérêt dans un cadre professionnel ?
Manuel Constant : Selon moi, cela permet de repérer des non-dits chez des personnes et de les transformer en solutions et en résultats d’affaires. Ces non-dits peuvent apparaître dans une multitude de situations. Notamment lors de :
- négociation,
- de recrutement,
- de vente,
- de discussion entre un gestionnaire et un salarié,
- d’enquête,
- de coaching,
- etc.
Autrement dit, connaître le non-verbal permet de faire de meilleurs recrutements, de faire aboutir des négociations de manière saine, de développer ses affaires, de gérer des conflits voire de les prévenir, de détecter des enjeux de santé mentale… Tout ce qui touche à la communication en réalité.
Peut-on prendre un exemple concret pour illustrer l’influence du non-verbal.
Manuel Constant : Je pense à un chasseur de tête qui devait rencontrer deux candidats pour un poste de haute direction. Sur le papier, les deux faisaient l’affaire. Puis, au cours de l’entrevue avec le premier candidat, est arrivée une question autour du leadership féminin.
La personne a dit qu’elle n’avait pas de problème avec cela… mais elle a fait au même moment un geste précis avec sa main gauche sous le nez. Un signal qui montre une incohérence entre le verbal et le non-verbal. Son corps avait parlé pour lui.
Comme le chasseur de tête était formé à la synergologie et qu’il recrutait pour une président femme, il a posé plus de questions sur le sujet. Et, au fur et à mesure, la position du candidat a fini par se cristalliser au point d’admettre que les hommes étaient biologiquement plus outillés pour gérer une entreprise ! Cela n’aurait donc pas pu fonctionner sur le long terme pour ce poste et c’est l’autre candidat qui a été choisi.
Y-a t-il des situations où il est plus difficile de contrôler son langage non-verbal (stress, fatigue etc.) ?
Manuel Constant : Non, le corps ne va pas parler plus que d’habitude dans des circonstances particulières. On ne peut pas contrôler notre langage corporel de manière isolée ou temporaire. D’autant que si on nous dit qu’il faut, par exemple, placer nos mains d’une certaine façon pour ne pas qu’elles laissent transparaître nos pensées, la personne va plus penser à cela qu’à son auditoire. Il va immédiatement y avoir une coupure et l’audience va s’en rendre compte.
Dit autrement : il ne faut pas essayer de contrôler son langage corporel, même si on se forme. C’est vain et le plus souvent contre-productif.
Notre corps ne nous trahit pas, il nous traduit ! Qu’on le veuille ou non, il va révéler la vérité. Des non-dits, il y en a chez tout le monde, au bureau comme à la maison. Je précise d’ailleurs que les non-dits ne sont pas forcément des mensonges. Ce n’est pas une volonté de déformer la réalité, c’est juste quelque chose qu’on ne verbalise pas et qui se manifeste malgré tout.
Y a-t-il une explication rationnelle derrière cette réaction du corps ?
Manuel Constant : Oui, mais l’explication est relativement complexe et fait appel à des notions de neurologies, d’anatomie etc. Pour le dire de manière synthétique, l’organisme est un tout, intelligent en soi. N’importe quel animal, même s’il n’a pas conscience de lui, exprime quand même des réactions spontanées. Notre corps exprime toujours un motif. Tout l’enjeu est de réussir à repérer les incohérences entre le verbal et le non-verbal.
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