Sébastien Fraser (Kryzalid) « Les mandats de conception de sites Web sont plus complexes que jamais! »

7 décembre 2021

Kryzalid fête ses 20 ans cette année. Fondée en 2001, l’agence montréalaise de conception numérique a vu ses premiers mandats passer de simples « cartes d’affaires » virtuelles, à des sites au contenu administrable, puis à de réels outils de vente avec des boutiques en ligne efficaces. Une entrevue sous forme de voyage dans le temps avec Sébastien Fraser, associé et cofondateur de l’entreprise.

Isarta Infos : Quand vous avez lancé votre entreprise, il y a de cela 20 ans, les sites Web étaient beaucoup moins performants qu’aujourd’hui. Racontez-nous.

Sébastien Fraser : Nos premiers sites étaient statiques, construits de toutes pièces et ne possédaient pas d’éditeur de contenus. La façon de les programmer était différente et il n’y avait pas de « framework » sur lequel on pouvait s’appuyer pour la base récurrente entre chacun.

Les réseaux cellulaires étaient atroces et la vitesse de téléchargement demeurait limitée. Le site devait être découpé en petites images et rassemblé en HTML. Les clients devaient faire appel à notre équipe pour toute modification. Il faut aussi se rappeler que les sites web étaient seulement vus sur des ordinateurs de table. Les téléphones avec écran tactiles n’existaient pas et le terme « responsive » était encore inconnu.

Isarta Infos : Quelle était alors l’utilité d’un site Web à cette époque ?

S. F. : En 2004, nous avons vu naître Facebook, et Google est entré en bourse. Le buzz autour d’Internet ne faisait que grandir. Les entreprises ont alors compris que ça leur prenait une vitrine virtuelle. Le site Web leur faisait une belle carte d’affaires, disponible en tout temps, 24 heures sur 24, 7 jours par semaine.

Ces entreprises ont vite réalisé qu’elles pouvaient transmettre des informations récurrentes utiles à leur clientèle, tout en diminuant le nombre d’appels des consommateurs. De leur côté, les entreprises qui n’avaient toujours pas de site web ont fini par céder sous la pression. Faire des sites web, c’était la ruée vers l’or de l’époque!

Isarta Infos : L’arrivée de WordPress et l’essor des « blogues » semblent ensuite avoir eu un impact sur la manière de concevoir un site d’entreprise.

S. F. : À partir de 2005, les gens ont commencé à vouloir éditer leur contenu eux-mêmes. C’est à ce moment que les systèmes de gestion de contenus [CMS ou « content management system » en anglais] ont pris leur envol. Avant ça, la seule façon de mettre à jour un site web rapidement, c’était de le créer avec Macromedia Flash (devenu Adobe Flash après rachat) en mettant à jour des fichiers XML.

L’arrivée des CMS tels Drupal, WordPress, etc., a donc changé les façons de faire. Par contre, au tout début, les possibilités pour les mises en page étaient plutôt limitées. Les CMS ont beaucoup évolué depuis et continuent de s’améliorer.

Gutenberg, la dernière version en date de l’éditeur WordPress, offre beaucoup plus de flexibilité une fois que le site est en place pour construire des mises en page par les clients, sans faire appel à notre équipe.

Isarta Infos : Depuis quelques années, on voit beaucoup de publicités faisant miroiter la possibilité de se créer un site « en quelques clics » (ex : Squarespace ou GoDaddy) quel est l’impact de ces plateformes sur votre travail?

S. F. : L’impact n’est pas considérable. Ces nouveaux outils sont utiles à de petites entreprises qui désirent mettre rapidement du contenu en ligne. L’information doit s’intégrer à des gabarits standard qui ne permettent pas toujours d’ajouter des fonctionnalités propres aux besoins de l’entreprise sans faire appel à une agence web.

Par contre, si une entreprise a des besoins particuliers ou des fonctionnalités distinctes, un site sur mesure répondra mieux à la demande. Et ce travail doit être réalisé par plusieurs experts : un stratège numérique (pour structurer l’information), un expert SEO (pour être visible dans les moteurs de recherche), un designer UX et un designer UI (pour s’assurer que l’image de marque de l’entreprise est bien véhiculée sur le site) et des développeurs web (pour s’assurer d’un rendu impeccable sur les différents navigateurs et les systèmes d’exploitation qui sont plus nombreux que jamais). En fait, les mandats de conception de site Web n’ont jamais été aussi complexes qu’aujourd’hui!

Le commerce en ligne a connu un véritable essor, en raison de la pandémie. Cette avenue ne date pourtant pas d’hier, et les plateformes sont relativement matures. Comment avez-vous vécu cette évolution?

S. F. : Dans les débuts du commerce en ligne, il nous est arrivé de faire des boutiques électroniques personnalisées, en créant de toutes pièces le panier d’achats et ses composantes. Il y avait beaucoup d’artisanat là-dedans. Nous avons aussi utilisé Magento pendant plusieurs années. Plus récemment, des solutions comme Shopify et WooCommerce parviennent à répondre à la plupart des besoins d’une entreprise qui vend un produit X, selon un modèle d’affaires traditionnel.

On s’aperçoit tout de même que dans certains contextes d’affaires plus complexes, ces paniers doivent être adaptés aux besoins de l’entreprise. Par exemple, notre client Teedy.com, fait de la livraison de cannabis médical. Or, la réglementation entourant ce service est très stricte (l’individu doit avoir une prescription médicale, permettre la traçabilité du produit et ainsi de suite).

Une plateforme comme Shopify à elle seule ne nous permettait pas de répondre à toutes ces exigences. Nous avons mis en place une application web basée sur Laravel pour arriver à proposer une solution adaptée aux besoins particuliers de notre client.

Maintenant que vous avez célébré vos 20 ans… à quoi vous attendez-vous dans les 5, 10 ans à venir? Qu’est-ce qui aura le plus d’impact sur la manière de concevoir un site? L’arrivée de l’IA, la réalité virtuelle etc. ?

S. F. : L’intelligence artificielle permet de faire beaucoup de choses… On a vu la montée des chatbots, ces outils de discussion qui offrent des réponses instantanées préformatées et qui peuvent venir en aide aux équipes de soutien et des ventes d’une entreprise. Il y a déjà des façons simples de les mettre en place.

La reconnaissance vocale sera aussi au cœur du développement futur. Comme par exemple commander en ligne sans utilisation du clavier, mais de façon conversationnelle. Mais ça n’est pas pour demain matin. Notre agence pourra certainement en faire bénéficier nos clients dans un futur proche.

Toutefois, la réalité virtuelle demeure une technologie dont on peut faire bénéficier nos clients dès maintenant et ira aussi en s’améliorant. Les appareils vont aussi continuer à évoluer. Qu’est-ce qui va remplacer le téléphone mobile dans sa forme actuelle? Quels seront les prochains écrans qui changeront la donne? Nous le découvrirons dans les années à venir, et il faudra s’y adapter. C’est ce qui fait que notre domaine est si captivant!

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