Sommet de l’innovation Tech RH 2025: Une feuille de route claire pour accélérer l’usage des technologies dans les RH

19 février 2025
Historiquement, le milieu des RH a toujours été réticent à l’idée d’intégrer de la technologie dans sa pratique. Compréhensible : il s’agit d’un métier centré sur l’humain. Plus récemment, l’IA a subi le même traitement mi-figue mi-raisin. Peut-on inverser la tendance ? Le Sommet de l’innovation Tech RH 2025 – tenu le 18 février dernier à Montréal – a offert un premier point d’ancrage. Reportage.
L’avenir appartient à ceux qui se lèvent tôt, dit le proverbe. Et donc, à 8 heures du matin, dans un Montréal paralysé sous 72,4 cm de neige bien tassée, les organisateurs Jean-Baptiste Audrerie, président de Nexa RH, et Marie-Ève Hermkens, fondatrice du Groupe Innove Now, ont présenté en conférence d’ouverture une « feuille de route » pour intégrer l’IA et les technos en général dans la fonction RH.
Au menu : analyse de CV dans le recrutement de masse, algorithmie pour gérer les horaires de travail, gestion par compétences, avec un « coup de cœur » particulier pour la notion de « base de connaissances », qui fait un retour en force dans les entreprises.
Selon les statistiques, on perdrait deux heures par jour à rechercher de l’information, a fait valoir Marie-Ève Hermkens. Mis bout à bout, ça représente une journée par semaine. Avec une simple base de connaissances bien organisée, on peut sauver un temps considérable. C’est devenu un atout vraiment stratégique pour les entreprises. »
Le délai de déploiement de ce type de solution ne se calcule pas « en mois », mais « en semaines », a d’ailleurs rappelé le président de Nexa RH.
Des technos qui demandent « beaucoup d’attention »
Tout au long de la journée, les conférenciers ont lourdement insisté sur les raisons de prendre le virage technologique en RH : déclin de la productivité au Canada, retard historique des PME à adopter les technos au Québec, besoins d’outils « d’efficience » et « résilience » pour faire face aux perturbations économiques, environnementales et démographiques.
Le rapport du World Economic Forum sorti à la fin janvier montre qu’il y a véritablement une disruption des compétences, a noté Jean-Baptiste Audrerie. L’économie est disrupté par plein de technologies, dont l’IA. Nous sommes dans une situation particulière où il y a un renouvellement complet des compétences recherchées. Et c’est pourquoi de plus en plus d’entreprises adoptent une gestion des compétences. »
Jean-Baptiste Audrerie explique que de plus en plus de logiciels RH intègrent des « solutions d’ontologie compétentes » ou un « système intelligent de gestion des compétences » permettant « d’étiqueter » et finalement, « consolider » toutes les compétences dans une organisation. Humble face à cette dernière innovation, il précise cependant que, pour fonctionner, ces solutions demandent pour le moment « beaucoup d’attention » de la part des RH.
Nous l’avons mis à la fin de la feuille de route, mais ça devrait presque être début, car ça va nous occuper pour les cinq à dix prochaines années en RH, » estime-t-il.
Des idées « anciennes »… enfin possibles !
Aux coins opposés de la salle de conférence, deux espaces démos ont vu se succéder des éditeurs de plateformes et de solutions RH qui avaient dix minutes pour donner un aperçu de ce qu’il est possible de faire avec leur outil.
Ce format « bref » a permis de mesurer l’étendue et la variété des solutions proposées, de la «solution pionnière d’analyse des sentiments» MLY par Explorance, à l’automatisation du processus d’analyse de risques en santé et sécurité au travail par E2ergo à la refonte éclair d’une page carrière de manière « vidéo » et « géolocalisée » de Relevance Studio, au contrôle à distance des examens ou tests de qualification pour les candidats par Uxpertise LMS.
À la sortie de ce premier Sommet de l’Innovation Tech RH 2025, il est fascinant de constater que la technologie rend enfin possible toutes sortes d’idées ou de stratégies RH qui parfois existent depuis plusieurs décennies, mais qui, faute de ressources techniques, avait été abandonnées car impraticables.
Plusieurs organisations ont tenté la gestion par les compétences, a fait remarquer Patrice Poirier, Président de SIGMA-RH. Or, tout le monde a eu le même problème : c’est la difficulté de collecter les compétences, puis de maintenir le régime. Personnellement, je n’ai pas vu d’entreprise y parvenir sur un horizon de 5 ans.»
L’IA peut résoudre ce problème, fait-il valoir. Par exemple, elle peut extraire les compétences d’un candidat, à partir de son CV, et celles d’un employé, en analysant la nature et la durée des projets auxquels il a participé.
Même scénario avec les fameuses « bases de connaissances ».
Dans les années 2000, est arrivé le mouvement du Knowledge Management (KM), nous a expliqué Nicolas Bonnafous, directeur du développement des affaires de la firme HalfSerious et évaluateur expert en intelligence artificielle d’IVADO. On a voulu créer des bases de connaissance à l’extérieur des chiffres, mais ça n’a pas marché, parce qu’on n’avait pas la technologie pour organiser la recherche dans ces systèmes. Aujourd’hui, avec la mise en place du master data management et l’arrivée de l’IA générative, qui peut lire et comprendre des documents, on est rendu là. On appelle ça l’agentique: c’est-à-dire qu’un agent est autonome pour questionner des documents ou des bases de données.»
L’humain à nouveau au centre des préoccupations
En début d’après-midi, John Dawson, directeur principal de la veille sur les talents, Dayforce, a donné une conférence sur «comment utiliser la techno et les copilotes pour augmenter les RH». Il a alors évoqué l’enjeu «d’éducation» lié à l’adoption des technos en RH. Lorsque Dayforce déploie une nouvelle technologie dans une entreprise, les six premières rencontres sont consacrées à expliquer ce que le client doit apprendre et comprendre pour lancer le projet.
Il a aussi fait ce rappel pertinent aux professionnels RH :
70 % du travail d’un professionnel des ressources humaines est administratif, peu importe s’il est expérimenté ou non. La raison en est que nous avons instauré cette notion en RH: nous devons contrôler le message qui sort – et nous pouvons encore le faire – mais nous devons donner accès à l’information beaucoup plus rapidement. Vous voulez automatiser ce qui peut l’être. Vous voulez vous débarrasser de ces tâches. Ainsi, vous pouvez vous concentrer sur le H dans les ressources humaines. Se concentrer sur l’humain, cela fait longtemps que nous ne l’avons pas fait.»
Voilà une perspective inspirante!
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