Créativité: les disparités géographiques persistent entre les industries
L’innovation et la créativité sont les moteurs du développement économique de nos villes, de nos régions et de nos pays. Mais qu’est-ce qui fait qu’une ville est plus innovante qu’une autre, et pourquoi certains quartiers semblent être plus propices à telle ou telle sorte de créativité?
Ce sont les questions auxquelles ont tenté de répondre le Martin Prosperty Institute et Greg Spencer, un professeur de l’Université de Toronto. Pour ce faire, ils ont utilisé les données compilées en 2001, 2006 et 2011 par la firme d’analyses Dun & Bradstreet auprès de 1,4 millions de sociétés, d’agences et de travailleurs autonomes des trois mégalopoles canadiennes: Montréal, Toronto et Vancouver.
Publiée dans le Regional Studies, cette étude fait état des disparités géographiques qui persistent entre les industries que les chercheurs définissent comme «artistiques» (cinéma, musique, vidéo, design, écrivains, artistes indépendants…) et celles dites «scientifiques» (informatique, médecine, R&D, technologie, pharmaceutique…).
Pour résumer, les entreprises estampillées scientifiques se retrouveraient plus largement dans les banlieues des trois grandes villes, à proximité des échangeurs autoroutiers pour faciliter les trajets des employés, qui ne résident généralement pas à côté de leur lieu de travail et s’y rendent ainsi en voiture ou en train. Il y a peu d’animation (restaurants, cafés…) ou de riverains alentour.
À l’inverse, les entreprises dites créatives sont essentiellement situées en plein centre de Montréal, Toronto ou Vancouver, là où la densité urbaine est forte, avec beaucoup d’animation, et une facilité d’accès à pieds ou en transport en commun – métro, bus. Leurs employés logent pour la plupart relativement proche de leur lieu de travail.
Greg Spencer indique, ainsi que le rapporte le site Citylab, que les quartiers animés attirent logiquement les employés d’entreprises «artistiques» puisque ces derniers se nourrissent précisément de tout ce qui les entoure: les gens, les lieux, les événements… Les cafés, restaurants, etc, constituent une sorte d’annexe de leurs bureaux.
Et bien que les loyers soient plus dispendieux en centre-ville qu’en banlieue, l’étude démontre que cela ne représente pas un facteur décisif dans le choix du lieu où s’établiront les entreprises dites «artistiques»: c’est être au coeur de la ville qui est, pour elles, primordial.
Malgré leurs différences, ces deux types d’environnements se regroupent tout de même. Ainsi que le souligne le professeur Greg Spencer, 55% des entreprises «scientifiques» canadiennes et 57% de celles labellisées «artistiques» sont concentrées dans les régions de Montréal, Toronto et Vancouver, qui n’accueillent pourtant que 35% de la totalité de la population canadienne (chiffres de 2011).
Cependant, il ne faut pas oublier que ces dernières années, de nombreuses start-ups techno ont fleuri dans les centres urbains, à l’image des jeunes entreprises logicielles qui déménagent en centre-ville de San Francisco, délaissant ainsi la Silicon Valley. Cette tendance modifiera certainement quelque peu les résultats de l’étude canadienne.
Mais la question qui, elle, persiste, est de savoir comment les décideurs peuvent attirer ces différents types d’entreprises et d’employés au sein de leurs villes? Selon Spencer, il s’agit d’opérer un savant mariage entre design urbain et développement économique. Il souligne également qu’il est plus difficile de séduire les «artistes», qui ne «construisent pas intentionnellement leur nid, lequel se crée plutôt du fait de leurs grandes flexibilité et adaptabilité».
Source: www.citylab.com