Est-ce que l’avenir des médias sociaux passe par les réseaux privés ?
Par François Nadeau
11 novembre 2020
Propos haineux, intimidation, désinformation : les grands médias sociaux représentent un endroit hostile pour plusieurs. Tandis que Facebook, Twitter et compagnie tentent d’améliorer le contenu qui circule sur leur plateforme, existe-t-il un avenir pour des réseaux plus nichés où les membres pourraient discuter de façon plus cordiale ?
Le problème n’est pas nouveau : le climat est souvent toxique sur les médias sociaux. Même en exprimant un point de vue banal, on s’expose à recevoir des commentaires insultants. Et cela sans compter toute la désinformation qui y circule.
Au fil des années, plusieurs personnalités publiques ont quitté les grands réseaux à force de recevoir des insultes ou d’être victimes de harcèlement. Dans l’ombre, une foule d’internautes ont suivi leurs pas, lassés eux-aussi de leur expérience.
Dans ce contexte, on peut penser que de plus en plus de conversations se déplaceront vers des canaux plus nichés, plus intimes, voire même carrément vers de nouveaux réseaux réunissant des membres ayant des intérêts et des profils similaires.
Des canaux déjà existants
Cette migration vers des canaux plus nichés est déjà en marche. Pensons notamment à la migration des plus jeunes de Facebook vers d’autres plateformes, dont Snapchat et Instagram, afin notamment d’échanger à l’abris de leurs parents.
Pensons aussi à la popularité grandissante des outils de messagerie comme Messenger ou WhatsApp. Finalement, donnons aussi l’exemple de ces groupes plus marginaux qui, chassés des grands réseaux, migrent vers d’autres plateformes où, pensent-ils, leur contenu ne sera pas censuré.
Ces espaces plus intimes, la consultante Sara Wilson les appelle des « digital campfires », soit des lieux plus intimes où les gens sont contents de se retrouver et de partager leurs intérêts communs. À l’inverse, elle compare les grands réseaux à un aéroport : un espace public achalandé où tout le monde a accès mais où personne n’est particulièrement enthousiaste de se trouver.
Les réseaux privés : l’alternative à Facebook et Twitter
Dans les dernières années, de nouvelles plateformes ont vu le jour afin d’offrir aux internautes une meilleure expérience. C’est le cas de Mastodon. Ce réseau rassemble une foule de petites communautés. Dans chacune d’elles, les utilisateurs peuvent instaurer leurs propres règles, pouvant aller de la totale liberté d’expression à une série de règles plus sévères sur le contenu publié ou le ton des échanges.
Un autre exemple de réseau privé est WT.Social, site de microblogage lancé en octobre 2019 par Jimmy Wales, le cofondateur de Wikipedia. Une des missions de celui-ci est de combattre les fausses nouvelles en fournissant du contenu basé sur des faits et des sources claires.
Tout comme Mastodon, WT.Social se veut une option aux grands réseaux et à leur contenu souvent toxique. Et contrairement à eux, il est financé par ses utilisateurs et non par la publicité. À cet effet, on peut se demander si une classe d’utilisateurs moins fortuné ne se trouve pas un peu mis à l’écart de ce genre de plateforme.
Quel avenir pour les réseaux privés ?
Mais est-ce que ces réseaux peuvent être viables à long terme ? Et si oui, quelle part de marché peuvent-ils réalistement occuper ? Même si on leur prédisait un bel avenir, plusieurs plateformes se définissant comme l’alternative aux grands réseaux n’ont pas connus le succès espéré. Pensons notamment à Ello, à Diaspora, ou même à Google Plus, dont le concept de « cercles » permettait pourtant des échanges plus intimes.
Sachant cela, on peut penser que la transition vers des échanges plus intimes et cordiales pourrait se faire davantage via les plateformes actuelles que par l’entremise de nouveaux réseaux. Cette transition se poursuivrait alors par l’utilisation croissante des applications de messagerie, de groupes privés sur Facebook ou LinkedIn, ou encore sur Twitter, avec ses comptes à accès restreint.
Des échanges mieux encadrés à l’intérieur de cercles plus intimes composés de gens partageant des intérêts et des valeurs similaires : est-ce la solution pour favoriser un climat moins toxique sur les médias sociaux ?
Si tel est le cas, ce serait toutefois dommage sur un point : les médias sociaux ont permis à des gens n’ayant justement pas le même parcours, les mêmes valeurs et la même vision du monde de se rencontrer et d’échanger entre eux. Se replier chacun dans notre bulle serait, en quelque sorte, un constat d’échec et nous ramènerait un peu plus vers notre chambre d’écho respective.
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