La bienveillance est-elle en déclin ? Reviewed by Philippe Jean Poirier on . 5 décembre 2023 Après quatre ans de régime pandémique où l'on a demandé aux gestionnaires d'être toujours plus flexibles et accommodants envers les employés, l' 5 décembre 2023 Après quatre ans de régime pandémique où l'on a demandé aux gestionnaires d'être toujours plus flexibles et accommodants envers les employés, l' Rating: 0

La bienveillance est-elle en déclin ?

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5 décembre 2023

Après quatre ans de régime pandémique où l’on a demandé aux gestionnaires d’être toujours plus flexibles et accommodants envers les employés, l’élastique a peut-être été étiré à son maximum. Selon un nouveau sondage de l’organisme Concilivi, les travailleurs trouvent que la conciliation travail-famille est plus difficile à atteindre cette année. Analyse.

En juin dernier, la firme Léger – mandatée par Concilivi – a sondé 1 003 parents et 1 252 proches aidants pour savoir s’il était « facile » ou «difficile » pour eux de concilier le travail et la famille. Si l’on compare avec les résultats de l’année précédente, le pourcentage de répondants qui gèrent la situation avec facilité a reculé de 8 points, passant de 67% à 59%.

Ensuite, les répondants de cette année se sentent moins bien informés sur les «mesures de conciliation» de leur employeur, toujours en comparaison de l’année dernière (66 % versus 74 % versus). Et la proportion de travailleurs qui jugent ces mesures «suffisantes» a reculé (59 % versus 63 %).

Bien que bon nombre d’employeurs se sont montrés conciliants durant la pandémie, il ne faut pas que ce soutien s’effrite avec le temps, fait-on valoir dans le communiqué de presse de Concilivi. Les employeurs qui ne réalisent pas encore que la conciliation famille-travail n’est pas une tendance – mais bien un besoin qui est là pour rester – ont intérêt à se réveiller rapidement puisque les conséquences auxquelles ils devront faire face seront inévitables. »

Des gestionnaires sous pression

Mélanie Plante, consultante RH, a elle-même remarqué un changement d’attitude, chez les gestionnaires.

En comparaison de l’an dernier, je remarque sur le marché de l’emploi en général et chez mes proches collaborateurs, une tendance au recul. »

Le recul dont elle parle ne porte pas tant sur « l’intention » d’accommoder les employés que sur «les moyens et la capacité» de le faire. Marie-Hélène Chèvrefils, CRHA, cofondatrice de la firme RH Evō conseils, renchérit sur le point:

J’accompagne plusieurs clients entrepreneurs, dirigeants ou gestionnaires dans cette ère de l’hyperpersonnalisation, dit-elle. Et même si la plupart de mes clients sont encore bienveillants, à l’intérieur, ils vivent des enjeux importants de stress, de tensions et santé mentale. » 

La consultante note que, ces dernières années, l’accent emphase a beaucoup été mis sur l’expérience employé, parfois au détriment de l’expérience gestionnaire.

L’expérience employé est un des piliers pour développer une culture de mobilisation, de rétention et d’attraction des employés, concède-t-elle. Ça doit donc continuer. Les pratiques de flexibilité et de conciliation aussi. Toutefois, il serait intéressant que l’on s’intéresse davantage aux gestionnaires et à leur expérience, afin d’assurer de réellement développer une culture d’engagement durable et éviter de déshabiller Paul pour habiller Pierre. »

À travers sa pratique, la fondatrice d’Evō conseils déploie des stratégies permettant de faire «coexister» les deux afin d’avoir un impact sur la rétention des deux parties prenantes toutes deux essentielles au succès de l’organisation.

Plus récemment, on peut aussi ajouter l’effet du ralentissement, qui peut jouer un facteur dans l’attitude des gestionnaires.

Le contexte économique actuel amène de la pression des deux côtés, note Mélanie Plante. Les employeurs ont tendance à voir les heures flexibles comme une forme de perte pour l’entreprise. Ça relève sans doute plus de la volonté de contrôle qu’une simple question de productivité, avouons-le. Toutefois, on peut comprendre que dans des situations critiques, certains gestionnaires décident d’offrir moins d’options. »

Vivre dans le présent

Plus largement, la consultante RH croit que les organisations doivent lâcher prise sur l’idée du retour en arrière, comme c’était avant.

D’un point de vue sociologique, j’observe encore beaucoup trop de comparaison entre le “avant” et le “après”, alors que TOUT est différent. Les familles vivent de plus en plus de pression, moins d’argent à la fin du mois, moins de temps pour prendre soin de son nid, souvent élargi. De là, l’idée que pour certaines organisations, voire la majorité, il est temps de repenser fondamentalement ses façons de faire et cesser l’interminable comparaison. Passons de “dans mon temps” à “il est temps de”. »

Repensons le modèle du travail, donc, pour un meilleur accommodement des employés.




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