Le grand paradoxe de la pandémie : des travailleurs canadiens en meilleure santé financière… mais plus stressés économiquement ! Reviewed by La Rédaction on . [caption id="attachment_78652" align="aligncenter" width="726"] Photo : whoislimos / Unsplash[/caption] 6 octobre 2020 La pandémie de COVID-19 a fait en sorte [caption id="attachment_78652" align="aligncenter" width="726"] Photo : whoislimos / Unsplash[/caption] 6 octobre 2020 La pandémie de COVID-19 a fait en sorte Rating: 0

Le grand paradoxe de la pandémie : des travailleurs canadiens en meilleure santé financière… mais plus stressés économiquement !

Par

Photo : whoislimos / Unsplash

6 octobre 2020

La pandémie de COVID-19 a fait en sorte que beaucoup de travailleurs canadiens qui continuent à toucher leur paie se portent mieux qu’avant financièrement. La logique voudrait que leur bien-être financier ait de ce fait progressé… mais il n’en est rien ! C’est plutôt le contraire qui s’est produit selon une nouvelle étude de l’Association canadienne de la paie (ACP).

L’amélioration de la situation financière de beaucoup est confirmée par le 12e sondage annuel de l’ACP auprès des travailleurs canadiens.

Que ce soit par contrainte ou par peur, le fait de ne pas avoir à se rendre au travail, à s’acheter de quoi manger le midi ou à acquitter des frais de garderie a permis à 62 % des travailleurs canadiens d’épargner plus de 5 % de leur paie, alors qu’ils n’étaient que 59 % à le faire en 2019.

Les Québécois sont d’ailleurs les plus nombreux au pays à épargner au-delà de 5 % de leur paie.

La proportion de ceux qui affirment vivre dans la précarité de paie en paie a par ailleurs régressé de 6 % par rapport à 2019, atteignant un plancher depuis la première édition du sondage il y a 12 ans.

Selon une analyse des précédents sondages de l’ACP auprès des travailleurs canadiens (2009- 2019) menée par le laboratoire d’analyse de données financières Western-Laurier – qui a montré que les Canadiens se divisent sur le plan financier en trois catégories, à savoir ceux qui sont financièrement stressés, ceux qui se débrouillent et ceux qui sont à l’aise, le fait d’épargner davantage aurait dû contribuer au bien-être financier.

Au cours des années précédentes, l’amélioration des habitudes d’épargne et la capacité à composer avec une difficulté financière passagère constituaient les critères les plus fiables pour déterminer à quel groupe appartenait tel ou tel répondant.

L’effet de la COVID-19 ?

Or, contrairement aux attentes, l’analyse des résultats du sondage de 2020 par le laboratoire précité, selon la même méthodologie, a montré qu’une proportion accrue de travailleurs canadiens sont aujourd’hui financièrement stressés et que le fossé entre ceux qui se débrouillent et ceux qui sont à l’aise s’est élargi.

En 2020, 43 % des travailleurs canadiens sont financièrement stressés (35 % en 2019), tandis que seuls 22 % se sentent à l’aise. De 2009 à 2019, chacun de ces groupes comptait un tiers des travailleurs canadiens.

Ces résultats se situent hors des marges prévisibles selon les tendances historiques, ce qui indique que d’autres facteurs ont influé sur la perception qu’ont les travailleurs canadiens de leurs perspectives financières dans le contexte actuel.

Il est difficile de déterminer à quel point la pandémie de COVID-19 a contribué à l’augmentation statistiquement significative du nombre de travailleurs financièrement stressés, précise le président de l’ACP, Peter Tzanetakis. Pendant plus d’une décennie, le bien-être financier des travailleurs canadiens était directement lié à des facteurs fondamentaux, stables et à long terme. Si la pandémie a forcé beaucoup d’entre eux à ne plus vivre au-dessus de leurs moyens et à épargner davantage, elle a en même temps engendré une énorme incertitude concernant l’évolution future de l’économie. »

Des influences sur le travail…

Les inquiétudes liées à tout un éventail de questions économiques ont fortement augmenté chez l’ensemble des travailleurs canadiens, qu’ils soient financièrement stressés ou à l’aise, ou encore qu’ils se débrouillent.

Aujourd’hui, 62 % des travailleurs canadiens jusqu’alors considérés comme financièrement à l’aise sont troublés par les perspectives inflationnistes, alors que moins de la moitié d’entre eux, soit 47 %, l’étaient en 2019.

Par ailleurs, 52 % des travailleurs financièrement stressés s’interrogent sur leur capacité à prendre leur retraite, contre seulement 45 % l’an dernier. Et, sans surprise, l’ensemble des travailleurs canadiens craignent davantage qu’avant une récession.

Le pourcentage de travailleurs canadiens inquiets s’est accru de 28 % chez ceux qui sont financièrement à l’aise ou se débrouillent, grimpant à 63 % chez les premiers et à 73 % chez les seconds. Ce même pourcentage est passé de 47 à 66 % chez les travailleurs financièrement stressés.

Même si l’augmentation du nombre de travailleurs canadiens financièrement stressés n’est pas une surprise, l’écart entre les résultats de cette année et ceux que les tendances historiques permettaient de prévoir nous a beaucoup étonnés, précise Adam Metzler, professeur agrégé de mathématiques à l’Université Wilfrid-Laurier et l’un des chefs de l’équipe qui a analysé les données. L’algorithme a permis d’établir qu’une combinaison complexe de nouveaux facteurs, y compris plus psychologiques que financiers, a cette année influé sur le stress financier des travailleurs, même ceux qui continuent de toucher leur paie et restent financièrement à l’aise. »

Le stress financier n’est pas qu’une notion abstraite. À la maison comme au travail, il a des conséquences réelles pour des millions de Canadiens, ainsi que pour leurs employeurs.

Près de 69 % des répondants au sondage de l’ACP ont avoué réfléchir à des questions financières personnelles quand ils sont au travail. Pour les entreprises partout au Canada, cela se traduit par une perte de productivité estimée à 20,3 milliards de dollars.

Les Québécois expliquent que le stress financier a (dans l’ordre) :

  • N’a rien changé (réponse « rien » 45,7 %)
  • Il a entraîné une chute de ma motivation au travail (30,3 %)
  • Entraîné une chute de productivité (13,8 %)
  • Les a poussés à quitter leur emploi ou en chercher un nouveau (12,1 %)
  • Fait prendre des congés personnels ou de maladie (6,4 %)
  • Tendu les relations avec les collègues (6,4 %)
  • Entraîné un accident de travail ou des problèmes de sécurité (0,4 %)

C’est une estimation conservatrice, précise M. Tzanetakis. Il faut aussi prendre en compte les coûts engendrés par la hausse de l’absentéisme, par la baisse de la motivation, par l’étiolement des relations entre collègues et par la rotation du personnel, que nombre de répondants citent parmi les conséquences du stress financier. Il est judicieux pour les dirigeants des organisations de porter attention au bien-être financier de leurs employés, et de le favoriser. »

… et des incidences dans la vie personnelle

Sur le plan personnel, un tiers des répondants ont déclaré que le stress financier a eu des retombées négatives sur les relations qu’ils entretiennent avec leurs proches, membres de la famille compris. De plus, 76 % ont déclaré que, même avant la pandémie de COVID-19, ils avaient renoncé à au moins certains plaisirs du temps des Fêtes (comme offrir des cadeaux ou assister à des fêtes) en raison du stress financier.

Les professionnels de la paie peuvent faire beaucoup pour atténuer le stress financier des travailleurs, ajoute M. Tzanetakis, mais ils ne peuvent y parvenir seuls. Le soutien des dirigeants d’entreprise est essentiel. Et il faut aussi que les gouvernements veillent à ne pas créer de nouvelles lois ou formalités administratives qui soient involontairement source de complexité et empêchent d’assurer à chaque travailleur canadien la paie exacte et sans retard à laquelle il a droit. »

Méthodologie

Le sondage a été mené en ligne du 26 mai au 3 juillet 2020 auprès de 4264 travailleurs canadiens, dont 88 % d’employés à temps plein issus du bassin de répondants de Framework Partners. La marge d’erreur de l’étude est de 1,5 %, 19 fois sur 20.



Retour en haut de la page