Les médias vont-ils interdire les commentaires sous leurs publications Facebook ?
Par François Nadeau
30 juin 2021
Le 15 juin dernier, CBC annonçait qu’elle retirait à ses abonnés la possibilité de commenter ses publications Facebook. Qu’est-ce qui a mené à cette décision, qu’elles en seront les impacts et combien de médias décideront de faire de même ?
En 2016, le journal The Telegraph annonçait la fermeture de la section commentaires de son site Internet. The Telegraph imitait alors une série d’autres médias ayant choisi de faire de même. Dans la majorité des cas, les nombreux commentaires inappropriés qu’on pouvait trouver au bas de leurs articles et la lourdeur de gérer ceux-ci justifiaient leur décision.
Quatre ans plus tard, en avril 2020, The Telegraph annonçait que la section commentaires de son site serait désormais réservée à ses abonnés. Selon le site, il s’agissait là d’une façon d’assurer des échanges plus civilisés.
Dans les dernières années, plusieurs sections commentaires de sites de nouvelles ont peu à peu perdu en popularité. L’absence de réels échanges et les nombreux commentaires haineux qu’on peut y trouver peuvent expliquer en partie le phénomène. La popularité accrue des médias sociaux constitue également un facteur qui a contribué à cette perte d’attrait. Cela n’a toutefois pas réglé le problème de la haine et de l’intimidation en ligne.
Diffamation, intimidation et menaces
En 2019, dans le cadre d’accusations de diffamation, un juge australien déterminait que les médias étaient responsables des commentaires laissés sur leur page Facebook. Pour ces derniers, ce jugement signifiait qu’en plus de la gestion des commentaires inappropriés sur leur page, ils seraient dorénavant responsables de les prévenir.
Quelques mois plus tard, la pandémie de COVID-19 a favorisé une montée des commentaires haineux et des menaces en ligne envers différents politiciens, journalistes et chroniqueurs. Ce phénomène n’est évidemment pas limité au Canada.
Devant cette haine contre laquelle les médias sociaux se battent depuis des années, Facebook a décidé en mars dernier de permettre aux administrateurs de pages, notamment les médias, de contrôler qui peut commenter sur celles-ci. La possibilité de réagir à une publication peut être ouverte à tous, comme elle peut se limiter aux personnes et aux organisations mentionnées dans celle-ci.
Le cas de la CBC : le premier d’une longue série ?
Quelques mois après l’annonce de Facebook, la CBC annonce qu’elle retire donc la possibilité à ses abonnés de commenter ses publications sur le réseau. Le diffuseur explique sa décision par la lourdeur de la gestion de sa page Facebook, mais aussi par les nombreuses attaques et menaces envers ses journalistes. La page de la CBC compte près de 600 000 abonnés. Le projet pilote a été annoncé pour une durée de quatre semaines.
Il restera à voir si la CBC poursuivra dans cette voie après ces quatre semaines d’essai, et surtout si d’autres médias emboiteront le pas.
À première vue, les médias se libèrent d’un gros poids en éliminant la possibilité laissées aux internautes de commenter leurs publications. Toutefois, cette façon de faire pose un risque. D’abord, l’algorithme de Facebook favorise les publications générant un nombre élevé d’interactions. Le fait de désactiver les commentaires pourrait avoir un effet négatif sur la portée des publications.
De plus, il faudra voir dans quelle proportion les abonnés se désintéresseront des pages qui ne les laisseront pas exprimer leur point de vue. Affaire à suivre donc.
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