Pourquoi Apple a fait des concessions historiques sur l’App Store ?
Par Kévin Deniau
31 août 2021
La firme à la pomme a annoncé le 26 août dernier qu’elle allait permettre aux propriétaires d’applications mobiles de proposer des moyens de paiement en dehors de l’App Store. Explications de ces concessions exécutées sous haute pression.
- Comment fonctionne l’App Store ?
Pour bien comprendre le problème, il convient tout d’abord de revenir au fonctionnement même du magasin d’applications d’Apple. Ce dernier est une véritable vache à lait du groupe. Et pour cause : c’est le seul endroit où les détenteurs d’un iPhone ou d’un iPad peuvent télécharger des applications. Son équivalent sur Android est le Google Play Store.
iOS, le système d’exploitation mobile d’Apple, est le deuxième du monde en termes de part de marché et, selon la firme de Cupertino, 643 milliards de dollars américains ont été dépensé en 2020 via cette boutique numérique. Apple prenant une commission de 30 % sur les ventes d’applications payantes ou sur les achats de biens et services numériques au sein des applications. Une rente très rentable… mais de plus en plus décriée.
Le 1er janvier 2021, déjà sous la pression des développeurs, la plus grande capitalisation boursière avait accepté de réduire ce taux à 15 % pour les nouveaux développeurs d’applications et ceux ayant réalisé moins d’un million de dollars de revenus.
- Pourquoi ce vent de révolte contre cette commission ?
La fronde vient notamment de deux acteurs numériques emblématiques : Epic Games, la société qui édite le jeu en ligne à succès Fortnite, et Spotify, le géant suédois de l’écoute de musique en ligne. Ces derniers reprochent à Apple d’abuser de sa position dominante (monopolistique ou duopolistique si l’on inclut Google avec Android) en leur imposant l’App Store comme intermédiaire obligatoire pour les transations de leurs utilisateurs et utilisatrices.
Leur souhait ? Au moins que les utilisateurs de leur application puissent avoir le choix au moment des paiements en ligne, autrement dit, qu’il soit possible de les faire payer directement depuis leur propre plateforme… sans commission d’Apple. Cette dernière répond que cela provoquerait des risques de cybersécurité. Un argument qui n’a pas convaincu les éditeurs frondeurs qui ont décidé de porter l’affaire devant les tribunaux.
- Quels changements propose Apple ?
La firme californienne a dévoilé, dans un communiqué publié le jeudi 26 août, plusieurs modifications de règles de son magasin d’applications, en plus de création d’un fonds d’aide aux petits éditeurs américains.
Cet accord précise que les développeurs peuvent faire part d’offres aux utilisateurs en dehors de leurs applis iOS », explique le groupe.
Autrement dit, que les applications peuvent envoyer des emails à leurs clients pour les inciter à acheter un abonnement directement depuis leur site Web. Un virage radical devant la pression grandissante…
Il faut savoir que Spotify ou Netflix contournaient déjà le système en n’offrant pas la possibilité à leurs utilisateurs de souscrire un abonnement via leur application… mais sans pouvoir les guider vers leur propre site Internet pour le faire !
Ue manière en tout cas pour le GAFA de relâcher la pression mise par Epic Games, dont l’issue du procès approche, Spotify mais aussi la Commission Européenne ou le Sénat américain, dans un contexte de plus en plus affirmé de lutte contre les monopoles numériques. Meghan DiMuzio, la directrice de l’association Coalition for App Fairness, qui regroupe des développeurs d’applications critiques envers les pratiques d’Apple ne se montre pas dupe toutefois :
L’offre d’accord factice d’Apple n’est rien de plus qu’une tentative désespérée d’éviter le jugement des tribunaux, des régulateurs et des législateurs du monde entier. (…) Si cet arrangement est approuvé, les développeurs seront toujours empêchés de communiquer à l’intérieur de leurs applications sur l’existence de prix plus bas ou de systèmes de paiement alternatifs [en dehors de l’univers d’Apple], » explique-t-elle.
Toujours est-il que David a, semble-t-il, commencé à faire plier Goliath. Jusqu’où ? Réponse vraisemblablement d’ici les prochains mois…
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