Prêt pour le règne des introvertis au travail ?
14 septembre 2021
Jusqu’en mars 2020, le modèle dominant d’organisation du travail était celui de la présence au bureau. De manière générale, les patrons et les gestionnaires avaient tendance à voir positivement les travailleurs qui faisaient de longues heures au bureau – quitte à faire du présentéisme – et à favoriser les employés forts en gueule, extravertis, qui ont le haut du pavé dans les réunions et les discussions de corridors.
Or, du jour au lendemain, tout le monde s’est retrouvé à la maison, seul derrière son ordinateur. Et soudainement, les introvertis se sont retrouvés comme des poissons dans l’eau.
Dès le début de la pandémie, les spécialistes RH ont tenté de convaincre un maximum de gestionnaires et dirigeants d’entreprise de passer d’un mode de gestion axé sur le comportement à un mode axé sur les résultats.
Ce dernier favorise les travailleurs autonomes et indépendants, qui ont beaucoup de facilité à manoeuvrer dans l’univers numérique. Mais aussi les gens plus introvertis, qui s’expriment de manière plus optimale derrière leur clavier d’ordinateur, à travers le filtre électronique des courriels et des salles de «chat».
Une étude sur le leadership en contexte de télétravail
D’ailleurs, une étude publiée tout juste au début de la pandémie, par la chercheuse Radostina K. Purvanova, professeure associée à la Drake University, est venue confirmer ce changement de paradigme, à l’avantage des introvertis. L’étude en question – menée avant la pandémie – voulait explorer les caractéristiques du leadership dans un contexte de travail à distance.
Les nouvelles données montrent que la confiance projetée, l’intelligence et l’extraversion qui a longtemps propulsé les travailleurs ambitieux dans les postes exécutifs ne sont plus suffisantes en ligne, parce qu’ils ne se transposent pas en leadership virtuel, explique-t-on dans un article de la BBC. À la place, les travailleurs qui sont organisés, fiables et productifs prennent les commandes des équipes virtuelles. En fin de compte, les faiseurs [«doers»] mènent les troupes, du moins à distance. »
L’étude montre que, en mode virtuel, ce n’est pas plus « les voix les plus dynamiques » qui mènent les troupes, mais celles qui accomplissent leurs tâches et atteignent leurs objectifs.
Et si le stigma de la paresse… changeait de camp?
Avant la pandémie, ceux qui préféraient travailler de la maison étaient souvent perçus soit comme des antisociaux soit des paresseux, car ils n’avaient la volonté de s’habiller et d’affronter le trafic. Ils préféraient travailler de la maison, mais comment savoir… s’ils travaillaient vraiment?
Dans un contexte où il est maintenant démontré que l’on peut être très productif à la maison – enchaîner les rencontres Zoom, régler mille et un problèmes par courriel ou téléphone, tout en se gardant des plages de tranquillité pour le travail nécessitant de la concentration, dans un contexte où la gestion orientée sur les résultats donne aux gestionnaires la preuve de la productivité d’un individu à la maison, il est permis de se demander si le stigmate de la paresse ne va pas bientôt changer de camp.
Ce n’est qu’une hypothèse, bien sûr. Mais il se pourrait bien que, dans les années à venir, les employés perçus comme improductifs ou carrément paresseux par la direction soient ceux qui tiennent mordicus à venir au bureau chaque jour.
Il se pourrait que les employés « extravertis », qui aiment faire du « social », en butinant d’un cubicule à l’autre, pour jaser, prendre des nouvelles et développer leur réseau d’influence, soient éventuellement perçus comme ceux qui se traînent réellement les pieds, et ralentissent la progression du groupe.
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