Snapchat : l’interface de la colère
Par Kévin Deniau
4 mai 2018
L’application préférée des jeunes adultes traverse une zone de turbulences : désaffection des utilisateurs après une refonte controversée, résultats financiers décevants, copie de la part de ses concurrents… Crise passagère ou véritable remise en cause de son modèle ?
L’application au petit fantôme jaune traverse une bien mauvaise passe. Alors que Twitter et Facebook viennent de présenter des résultats financiers trimestriels étincelants, Snapchat, pour sa part, est à la peine.
Au cours des trois premiers mois de l’année, l’application de partage de photos et de vidéos n’a gagné que quatre nouveaux millions d’utilisateurs, un niveau historiquement bas, alors que les analystes tablaient plutôt sur sept millions. Pire : fin mars, il y avait moins de personnes qui utilisaient Snapchat quotidiennement que sur l’ensemble du trimestre.
Nouveaux utilisateurs sur Snapchat par trimestre
Côté revenus, c’est aussi la douche froide. Après une croissance quasi ininterrompue, ils se sont effondrés de près de 20 % à 231 M$ par rapport au trimestre précédent.
Revenus de Snapchat par trimestre
Le revenu par utilisateur chutant pour sa part à 1,21 $ (contre 1,53$ précédemment)… bien loin des 8,25 $ de Facebook !
Après une perte de 3,4 milliards de dollars américains l’an passé, l’application plébiscitée des jeunes adolescents, a de nouveau perdu plus de 385 millions de dollars au premier trimestre. Conséquences : Snap a chuté de plus de 20 % en bourse et s’apprête à licencier une centaine d’employés. Une troisième vague de départs depuis son introduction en Bourse, l’an passé.
Une nouvelle interface qui ne passe pas auprès de sa communauté
La raison de cette dégringolade ? La nouvelle interface, lancée le 8 février dernier, qui visait à mieux séparer le contenu des amis et celui des marques et médias (afin de mieux mettre en valeur cette section qui lui rapporte de l’argent).
Raté. La refonte n’a pas du tout été du goût des utilisateurs. Une pétition en ligne réclamant le retour de l’ancienne version a réuni plus de 1,2 million de signataires. La vedette de télé-réalité et demi-soeur de Kim Kardashian, Kylie Jenner, aurait même fait perdre plus de 1 milliard de dollars en bourse à l’application, à la suite… d’un tweet ! « Est-ce que quelqu’un d’autre n’ouvre plus Snapchat ? Ou c’est juste moi… euh, c’est tellement triste », avait-elle écrit.
sooo does anyone else not open Snapchat anymore? Or is it just me… ugh this is so sad.
— Kylie Jenner (@KylieJenner) 21 février 2018
Il faut dire qu’entre temps, l’application créée en 2011 et qui a toujours refusé de se faire racheter par Google ou Facebook, s’est fait allègrement copier par ses concurrents : images éphémères, filtres et même les Stories qui ont fait sa renommée. Copié… et même dépassé par Instagram ou WhatsApp, toutes deux détenues par le réseau social de Mark Zuckerberg, et qui possèdent beaucoup plus d’abonnés que Snapchat.
Après avoir indiqué qu’il n’y aurait pas de retour en arrière, Evan Spiegel, le créateur et PDG de 27 ans de l’application a finalement fait machine arrière il y a quelques semaines, alerté vraisemblablement par ces mauvais chiffres.
Une communauté qui fait rêver les annonceurs… mais difficile à monétiser
Mais au-delà de cette polémique sur son interface, la vraie question que se posent les analystes est le modèle économique de Snapchat. La valorisation à 17 milliards de dollars de la jeune pousse tient à sa capacité à capter la cible des jeunes adolescents mieux qu’aucune autre application.
Selon le cabinet eMarketer, ces derniers préfèrent en effet largement Snapchat à Instagram, selon un sondage effectué aux Etats-Unis.
Ne reste qu’à valoriser ce trésor… sachant qu’il est nettement plus difficile d’intégrer de la publicité pour le moment sur Snapchat par rapport à Facebook ou Instagram. Sa tentative de diversification avec ses lunettes connectées Spectacles n’a pas été une franche réussite. Qu’importe, l’application persiste et vient d’en lancer la deuxième version.
Snapchat qui n’a que 6 ans, peut toutefois se rassurer en regardant l’histoire d’une autre application qui a connu de nombreux soubresauts : Twitter. Cette dernière, qui vient d’enchaîner un deuxième trimestre de bénéfices d’affilée, n’a commencé à être rentable… que plus de 10 ans après sa création ! Reste à savoir si la patience de ses investisseurs sera, elle-aussi, éphémère ou non.
Source des graphiques : Recode
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