« Tracances » : L’été ou jamais ?
7 juillet 2023
Il fallait un monde «post-pandémique» pour voir naître une telle tendance RH, qui demande une normalisation du télétravail et une ouverture des frontières. Introduction au concept de « tracances » (« workation » en anglais), qui a piqué l’intérêt des entreprises en cette période estivale 2023.
Le néologisme provient de l’amalgame des mots « travail » et « vacances ». Il signifie généralement deux choses : le fait de prolonger le séjour de sa destination vacances avec l’engagement de travailler pendant ce temps supplémentaire, ou encore, le fait de choisir un moment « hors vacances » pour aller travailler dans une destination touristique.
Sans la progression du télétravail pendant la pandémie, cela n’aurait pas été aussi facile aujourd’hui de « tracancer », reconnaît Annie Boilard, CRHA, présidente de Réseau Annie RH.
La CRHA est triplement familière avec le concept, ayant accompagné des entreprises dans la création de leur politique de tracances, l’ayant implanté dans sa propre entreprise et l’ayant elle-même utilisé pour participer à des événements sportifs.
De toute évidence, le concept séduit. Dans un sondage de janvier dernier mené par OnePoll auprès de 1 000 travailleurs ayant l’option de faire du travail hybride, huit sur dix ont répondu qu’ils considéraient travailler d’une destination de vacances « de manière à prolonger leur voyage, si l’option leur était proposée ».
Le mot est apparu dans le vocabulaire RH à l’été 2022, mais peu d’entreprises offraient cette option à leurs employés, explique Annie Boilard. Cet été, ça fait de plus en plus jaser et des entreprises comme Energir et KPMG ont des politiques officielles à cet égard. »
Plus encore, il commencerait à se développer une offre de voyage autour des destinations les plus propices aux « tracances », des lieux, présume-t-on, qui allient attraits touristiques et infrastructures de travail.
Il y a aujourd’hui des agences de voyages qui offrent des destinations « tracances ». Il existe des palmarès de région pour aller tracancer; dans le haut de ces palmarès, on trouve des villes comme Brisbane en Australie et Lisbonne au Portugal. »
Un mot, plusieurs sens
Si la première image qui vient en tête est une personne qui travaille du chalet ou d’une place dans le Sud, le concept peut s’appliquer dans d’autres contextes.
Parfois, ce sont des parents d’enfants-athlètes qui ont besoin de faire ça pour accompagner leurs enfants dans des compétitions. On peut aussi penser à une personne ayant un proche parent qui vient de recevoir un congé de l’hôpital et qui veut travailler de son chevet.
D’ailleurs, le phénomène peut exister sans être nommé comme tel, ou apparaître sous d’autres dénominations. Dans une publication LinkedIn d’Annie Boilard abordant justement le sujet, des intervenants ont fait valoir que leur entreprise avait une politique de « travail hors Québec » fort similaire à la notion de « tracances ».
Toutefois, Annie Boilard trace une ligne entre un travail qui serait délocalisé – s’effectuant 100% en télétravail – et ce qui pourrait être décrit comme un «avantage social», ponctuel et sporadique.
Si j’ai un collègue basé en Europe, je ne ferai pas exprès de mettre des réunions en fin de journée, illustre-t-elle. Or, dans un scénario de tracances, la responsabilité repose sur la personne en déplacement. C’est au tracancier de s’assurer que son voyage est compatible avec les besoins de ses clients, de ses collègues et de l’entreprise. Ce n’est pas à l’équipe de s’adapter à la destination vacances de l’employé, c’est l’inverse. »
La CRHA ajoute une autre mise en garde. En aucun cas, les « tracances » ne doivent remplacer les vacances.
Les entreprises ne veulent pas que les employés travaillent pendant leurs vacances, insiste-t-elle. Le but est plutôt de prolonger un séjour dans une destination vacances ou simplement, de travailler d’un lieu autre que sa résidence ou le bureau. »
Dans un prochain article, nous verrons à quoi peut ressembler une politique officielle de «tracances».
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