Comment le Port de Montréal effectue sa transformation numérique grâce à l’innovation ouverte Reviewed by Kévin Deniau on . [caption id="attachment_70030" width="425"] Daniel Olivier : "Pour moi, l'innovation ce n'est pas une recette, c'est avant tout une culture."[/caption] 5 novemb [caption id="attachment_70030" width="425"] Daniel Olivier : "Pour moi, l'innovation ce n'est pas une recette, c'est avant tout une culture."[/caption] 5 novemb Rating: 0

Comment le Port de Montréal effectue sa transformation numérique grâce à l’innovation ouverte

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Daniel Olivier : « Pour moi, l’innovation ce n’est pas une recette, c’est avant tout une culture. »

5 novembre 2019

En septembre 2018, le Port de Montréal annonçait son association avec le Centre de l’entrepreneuriat technologique (Centech) et l’École de technologie supérieure (ÉTS) pour créer le premier accélérateur d’innovation portuaire en Amérique du Nord. Nous avons rencontré cet été Daniel Olivier, son directeur de la veille stratégique et innovation, pour faire le point sur cette initiative d’innovation ouverte. Entrevue.

Pouvez-vous nous parler de vos enjeux actuels qui vous ont poussés à avoir recours à l’innovation ouverte ?

Daniel Olivier :  Nous avons une vision stratégique : devenir un chef de file stratégique en port intelligent. On a clairement le vent dans les voiles présentement, avec des taux de croissance historiquement élevés. Et, vu le contexte avec l’accord de libre-échange avec l’Europe (CETA), on va devenir un moteur encore plus important à l’avenir.

Ce qui représente un enjeu de capacité à court terme. On ne peut plus régler ces enjeux de congestion juste en ajoutant de l’infrastructure. Nous devons donc migrer d’un fournisseur classique d’infrastructures, pour les trains, les camions ou les navires, ce que nous sommes, à un fournisseur de solutions numériques pour l’ensemble de la chaîne logistique. 

Les grandes questions que l’on se pose désormais sont comment je peux utiliser l’intelligence artificielle pour optimiser et prédire mieux les flux ? Comment me servir de la chaîne de blocs pour mieux sécuriser ma chaîne logistique ? Comment je peux me servir de la réalité virtuelle ou augmentée pour mieux planifier mon infrastructure ? On est une entité fédérale en pleine transformation numérique.

Il faut voir que le Port de Montréal représente plus de 19 000 emplois directs et indirects et 2,6 milliards de retombées économiques. Dans chaque conteneur exporté, il y a en moyenne 40 000 $ de valeur de marchandise. C’est important !

Et pourquoi donc s’être orienté vers l’innovation ouverte ?

D. O. : Pour moi, innovation ouverte, ça rime avec coopération. C’est une rupture avec le modèle classique que le port maîtrise bien. À savoir : on identifie une problématique, on rédige une solution, on contracte et on l’exécute.

Dans le cas de l’innovation ouverte, on réfléchit à l’architecture de la solution ensemble, avec les startups. Ça peut nettement accélérer notre cycle d’innovation et…  atténuer nos risques d’innovation !

Car, qui dit innovation, dit potentiellement aussi risques voire échecs. On est tout à fait conscient de ça. D’autant que les risques, en tant qu’organisation fédérale, c’est pas des choses qu’on aime tellement.

À quand remonte cette volonté ?

D. O. : Notre baptême en innovation ouverte s’est fait en décembre 2016, à l’occasion d’un hackaton qui était organisé par la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. La problématique était la suivante : on a une application mobile qui permet aux camionneurs de mesurer les temps de congestion en temps réel. On voulait la bonifier pour améliorer l’expérience du camionneur et avoir une meilleure planification des flux de camions au port. Pensez qu’on doit gérer entre  1 800 à 2 200 mouvements de camion par jour !

On a donc lancé la problématique et une startup, MLDB,  a été retenue. Elle avait proposé un algorithme prédictif du temps de transaction des camions. Malheureusement pour nous, très vite, elle s’est fait racheter par Element AI. Ce qui a ralenti le projet.

On a toutefois recréé le modèle pour d’autres projets par la suite. Comme ici, à l’ÉTS, avec le défi « Port Intelligent ». On lance une problématique aux étudiants de troisième année en génie de la logistique, et ils en font un projet de session. C’est assez extraordinaire la qualité des idées qui ressortent de là !

On souhaitait aller plus loin et quand le Centech est apparu, en septembre 2018, on s’est dit que c’était un upgrade de ce que l’on faisait déjà. Mais cette fois, pas avec des étudiants, mais des startups.

Que trouvez-vous ici de différent ?

D. O. : On est vraiment dans un écosystème. On n’est pas juste ici pour l’espace. Et le rôle que joue le Centech dans le filtrage des startups, c’est énorme pour nous. C’est une valeur ajoutée majeure.

Pouvez-vous nous parler de vos projets concrets actuels ?

D. O. : Nous avons 4 projets en cours. Trois startups sont issues du Centech et nous en avons amenée une.

  • Tout d’abord, nous travaillons avec la startup Merinio, qui fait fait une application de répartition de la main d’oeuvre, notamment mise en place à la Ronde. Au lieu d’avoir une personne qui appelle pendant plusieurs heures pour trouver des gens, l’application le fait de manière automatique. On est en train de la tester chez nous pour avoir la bonne main d’oeuvre au bon moment.

 

  • Nous hébergeons également dans notre cellule innovation la startup Canscan. C’est une solution d’intelligence artificielle en imagerie visuelle pour l’inspection des conteneurs. Lorsqu’un camion arrive pour livrer un conteneur au port de Montréal, il y a des personnes qui vont vérifier le conteneur : son intégrité physique, est-ce qu’il est percé, rouillé, bossé… Donc au lieu d’avoir une personne humaine qui fait ça, le processus d’imagerie va l’inspecter avec des algorithmes intelligents. Ce qui permet aux vérificateurs de ne prêter attention qu’à ceux qui ont une anomalie. Cela facilite donc le travail des vérificateurs tout en augmentant la fluidité des entrées de conteneurs.

C’est une belle histoire : la fondatrice travaillait pour un de nos clients, un transporteur maritime. Elle connaissait donc bien les enjeux et savait qu’il y avait là une niche. Elle a d’ailleurs gagné deux prix à StartupFest cet été

Entrevue avec Jennifer Ivens de Canscan au StartupFest 2019.

Félicitations à Jennifer Ivens, fondatrice de Canscan et une membre de notre famille Centech #centechfamily qui a remporté 2 prix lors du Startupfest 2019: Le Best Onstage Pitch et le Best of the Fest – Women in Tech.

Elle nous partage son expérience et son cheminement inspirant dans cette courte vidéo animée par Richard Chénier, notre directeur.

Pour ceux qui aimeraient aussi se lancer dans cette aventure, ne manquez pas la prochaine date de dépôt de candidature:
LE 2 AOÛT prochain.

Voici le lien pour s’inscrire: https://axl.centech.co/appliquer

Publiée par Centech sur Lundi 15 juillet 2019

Nous développons aussi avec des étudiants de l’ÉTS un projet de base de données des accès de sécurité pour les camions qui entrent au Port de Montréal.

Enfin, nous avons un projet avec ARA Robotique de modélisation 3D du Port. Ce qui permet de vivre une expérience immersive en réalité augmentée et en trois dimensions, soit par des lunettes soit avec un iPad. Ce qui a fait apparaître de nouveaux usages : pour inviter des clients à visiter virtuellement le Port depuis la Chine ou l’Inde, pour mon gestionnaire d’infrastructure qui veut reconfigurer des espaces et visualiser les résultats que cela donnerait… Quand on a vu la solution, on a vu un potentiel majeur d’innovations.

Quel est votre bilan à date ?

D. O. : Pour l’instant, les quatre projets en question ont du succès. Mais, on le sait, il va y avoir des échecs. C’est certain. Sauf qu’ici, on atteint un bassin de talents qu’on n’a pas chez nous. Avec les nouvelles technologies émergentes, tout bouge plus vite et il faut s’adapter au même rythme.

C’est l’avantage d’avoir accès aux meilleurs de l’écosystème ici. Je vais mettre l’argent sur un projet avec un livrable concret, plutôt que d’embaucher une ressource qu’il faudra former et qui ne sera opérationnelle que quelques mois plus tard.

On est ici pour accélérer notre cycle d’innovation et pour « innover en amont », c’est-à-dire avant d’être frappé par des problématiques. On sait très bien que la prochaine vague de disruption sera dans le numérique. Donc on est en train d’orchestrer cette migration plutôt que de se faire prendre dans 5 ans. Mon rôle de veille stratégique c’est d’être toujours proactif et d’anticiper.

Quelles sont vos prochaines étapes ?

D. O. : On aimerait amener des partenaires qui sont près de nous. L’administration portuaire de Montréal est un gestionnaire immobilier. J’aimerais donc embarquer des opérateurs de terminaux, des transporteurs maritimes ou ferroviaires pour avoir une représentation complète de la chaîne logistique. Ce qui permettrait d’adresser des problématiques transversales et mutualiser les risques d’innovation ensemble.

Un dernier mot sur votre conception de l’innovation ?

D. O. : Il y a un certain danger à avoir dans son titre le mot innovation. Car, la dernière chose que l’on veut, c’est qu’un employé dise : « l’équipe de Daniel s’occupe d’innovation, alors c’est bon. »

Pour moi, l’innovation ce n’est pas une recette, pas un processus, c’est avant tout une culture. Le Centech, c’est ainsi pour nous une façon de contaminer nos gens ! On les amène ici car on veut amener l’innovation ouverte comme modèle.

Retrouvez notre série d’articles et de témoignages sur l’innovation ouverte ici.



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