Le nouveau RFSPI : bien plus qu’un « Panier Bleu » des entreprises québécoises de services professionnels
Par Kévin Deniau
10 juin 2020
Le 12 mai dernier, 80 entreprises québécoises lançaient officiellement le Regroupement des Firmes de Services Professionnels Indépendantes (RFSPI). Nous avons interrogé Olivier Laquinte, le président fondateur de Talsom, l’une des firmes à l’origine du mouvement, pour en comprendre sa raison d’être et ses objectifs.
D’après le communiqué de lancement, les firmes de services professionnels indépendantes à direction et à propriété québécoises emploient plus de 127 000 personnes dans des structures de 10 personnes et plus, et livrent annuellement près de 12 milliards de services au Québec. Un maillon essentiel à l’économie québécoise sur lequel Olivier Laquinte veut capitaliser :
Nous voulons jouer un rôle actif dans la relance économique au Québec et c’est pour cette raison que nous nous sommes regroupés : afin de proposer une réponse collective aux enjeux auxquels devront faire face les décideurs. Ensemble, nous réunissons un éventail complet d’expertises et de services professionnels pour permettre aux gestionnaires de devenir les leaders dont l’économie québécoise a besoin pour passer au travers de cette crise. »
L’idée de ce regroupement a pourtant germé bien avant la COVID-19.
On a commencé à parler des enjeux entrepreneuriaux derrière le développement des firmes de services professionnels autour du mois de novembre, se rappelle le fondateur de la firme-conseil spécialisée en transformation numérique montréalaise. On a alors réalisé que nous avions des associations sectorielles diverses mais pas de groupe transverse pour aborder le cadre entrepreneurial et le développement des entreprises. »
150 cosignataires locaux
La crise a alors joué un rôle d’accélérateur pour l’initiative : d’une dizaine en mars, le nombre de firmes indépendantes cosignataires du regroupement est passé aujourd’hui à plus de 150. Telles bicom, Bleublancrouge, NATIONAL, Adviso, Camden, Bob agence, Dialekta, lg2, Léger, Langlois avocats, Republik, Sept24, Tam-Tam/TBWA, Tact… pour n’en citer que quelques-unes.
Je dois avouer être un peu surpris par l’engouement que cela a créé, s’étonne encore Olivier Laquinte. Mais cela a démontré que le besoin était là et qu’il était important de dire qu’on était là, qu’il y avait des entrepreneurs.euses derrière ces firmes ».
Selon un sondage mené par le Regroupement auprès de ses membres, 85 % des firmes de services professionnels déclarent être admissibles aux programmes de subventions et de prêts émis par le gouvernement, mais plus de la moitié (51 %) estiment que ces programmes seront insuffisants.
En cas de prolongement de la situation actuelle, une firme sur trois ne pense pas être en mesure de survivre au-delà d’un horizon de 6 mois et 40 % estiment qu’un retour des activités à leur niveau de performance d’avant la crise ne pourra se faire avant une période de 6 à 24 mois.
Pour lui, il n’y a pas de lien entre la création de ce regroupement et la polémique créée par l’obtention de l’important contrat (45 millions $) du gouvernement du Québec pour construire l’image du déconfinement à Cossette, agence québécoise mais propriété de l’entreprise américaine Legacy Acquisition depuis 2019.
Notre objectif, c’est vraiment de réfléchir à notre secteur et à la place que prend l’économie du savoir dans l’économie globale du Québec, » explique-t-il.
Pour faire partie du regroupement, rappelons tout de même que la propriété d’au moins 50 % du capital de l’entreprise doit être détenue au Québec, que l’autorité de décision doit appartenir exclusivement aux propriétaires locaux, ce qui assure le maintien du siège social localement (les franchises, les filiales et les firmes locales appartenant à des regroupements internationaux sont de fait exclues) et que la structure doit avoir une dizaine d’employés au moins. Un comité a d’ailleurs été mis sur pied pour évaluer les demandes entrantes.
Les citoyens du Québec veulent faire leur part pour donner un regain de vie à l’économie d’ici, un répit à nos entrepreneurs, à nos bâtisseurs, à nos porteurs d’idées. Beaucoup d’initiatives ont été lancées dans les dernières semaines et le RFSPI s’inscrit dans cette lignée. Au-delà de nos propres firmes professionnelles, il y a la santé économique du Québec, or cette santé passe par un entrepreneuriat fort et un pouvoir décisionnel local. Nous unissons notre voix à celle de nos collègues, de nos compétiteurs et de nos ami(e)s propriétaires de firmes indépendantes, » résume ainsi Félix Major, vice-président Intelligence commerciale chez Camden, lors de l’arrivée de l’agence dans le groupement.
Un rôle à jouer dans la relance
À quoi va donc servir concrètement le RFSPI et quelles seront ses actions ?
Tout d’abord, on est en train de développer un portail sur lequel les entreprises pourront avoir accès aux services locaux et soumettre leur demande. Ce sera une porte d’entrée pour les grandes instituons. Une sorte de « services bleus », en référence au « Panier Bleu« , même si l’objectif est bien plus grand que cet élément de court terme, » détaille Olivier Laquinte.
Il est aussi prévu un volet sensibilisation pour permettre aux entreprises du Québec Inc. de se transformer grâce aux services de ces firmes-conseil. Enfin M. Laquinte évoque à long terme la création de communautés d’échanges pour favoriser l’entrepreneuriat dans ce secteur.
Selon lui, les autres associations ont bien perçu ce regroupement :
Nous agissons au niveau entrepreneurial et pas sur le volet métier. Notre but est de travailler en collaboration avec ce qui existe déjà et non de s’y substituer. Nous sommes complémentaires. »
Pour l’heure, la structure du regroupement n’est pas encore définie et une équipe travaille à la forme que va prendre le RFSPI pour assurer sa pérennité. Mais pour Olivier Laquinte, le plus important est aujourd’hui la relance économique :
Les entreprises sont incitées à se transformer. Et nous avons une place dans cette relance car notre coeur de métier, c’est justement d’aider les entreprises à évoluer et à rebondir ».
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