Quelles sont les nouvelles tendances pour recruter et fidéliser des talents ?
Par Kévin Deniau
15 mars 2019
À quoi voit-on que la pénurie de talents est un sujet majeur dans l’industrie actuellement ? Réponse : à l’affluence de la conférence sur le sujet organisée par Les Événements Les Affaires, ce mercredi 13 mars, au Centre Sheraton à Montréal ! Dont voici le compte-rendu du panel sur les dernières tendances en termes de recrutement.
La journée, dont Isarta était partenaire, était ainsi consacrée aux différentes solutions pour faire face à ce grand enjeu : robots, stratégie de fidélisation, marque employeur, recrutement interne ou à l’international…
Et en guise d’introduction au sujet, Éric Bélair, conseiller sénior acquisition de talents chez Victrix, s’est chargé d’animer une grande discussion autour des nouvelles tendances à retenir en la matière.
Premier thème abordé : la technologie. Si cette dernière est venue modifier en profondeur la profession de recruteur ces dernières années, les intervenants ont malgré tout insisté pour qu’elle reste à une juste place.
Nous ne devons pas être esclave de la technologie, l’humain doit rester au centre de l’organisation », estime Florian Pradon, responsable expérience candidat chez GSoft, que nous avions déjà interrogé à ce sujet il y a quelques jours.
Les outils sont des facilitateurs de rencontre. Ils permettent d’automatiser ce qui n’est pas à haute valeur ajouté, confirme Sandrine Théard, formatrice en recrutement et présidente des Sources Humaines (l’organisatrice notamment de TRUMontréal). Mais ils doivent davantage être positionné comme un partenaire stratégique dans le recrutement. Attention donc à ne pas tomber dans le côté gadget : trop d’outils tue l’outil ! »
Olivier Schmouker, chroniqueur et blogueur pour Les Affaires cite d’ailleurs à ce sujet une étude de Pwc de 2019 : 52% des employeurs au Canada pensent qu’ils gagneraient à utiliser ces outils de recrutement. Donc ils sont prêts à franchir le pas. Mais en parallèle, seulement… 2 % disent qu’ils ont de la donnée utilisable !
Et quid des sites d’emplois pour faciliter son recrutement ?
L’investissement en temps et en argent est minime au final. Donc je les conseille mais à condition de bien cibler et de viser des sites spécialisés et moins généralistes, indique Anne Bourhis, professeure titulaire en GRH à HEC Montréal (NDLR : Chez Isarta Emplois, on ne saurait dire mieux ;)). Au final, il faut vraiment être multi-méthodes et travailler sur une panoplie globale »
Sandrine Théard recommande également de recourir au sourcing, c’est-à-dire de débusquer des candidats qui ne sont pas forcément en recherche d’emplois.
Sourcer, c’est un état d’esprit et pas seulement un outil. On peut utiliser Linkedin évidemment. Moi j’aime bien aussi le faire sur Google »
Quelles nouvelles compétences pour le recruteur ?
Ce sujet amène d’ailleurs à une réflexion plus globale sur les nouvelles compétences nécessaires du recruteur.
L’usage des réseaux sociaux est clairement entré dans la pratique, les recruteurs n’ont plus le choix : il faut composer avec ! Il faut être sincère et authentique quand on évoque la réalité de l’organisation. C’est très important car on parle de marque employeur ici », affirme Florian Pradon.
La capacité d’influence est devenue primordiale dans le métier. Aujourd’hui, les entreprises doivent se vendre et être capable de sensibiliser en interne aussi sur cet enjeu, ajoute Anne Bourhis. Il ne faut pas attendre d’avoir un besoin pour comprendre ce que l’on cherche. Cela veut dire : connaître sur le bout des doigts son entreprise mais aussi ce que font ses concurrents en matière de RH, ceux qui veulent attirer les mêmes talents ».
Un constat partagé par Olivier Schmouker :
Le recruteur doit de plus en plus être un recruteur de recruteurs. Tout le monde peut aider le recruteur en interne en référant des personnes ».
Aujourd’hui, le recruteur est à la croisée des chemins entre la vente et les RH selon Sandrine Théard. C’est d’ailleurs une formidable opportunité pour lui ou elle de développer ses compétences, pour la formatrice.
Pénurie ou gaspillage de talents ?
Autre sujet abordé : le recrutement multiculturel. Les chiffres parlent d’eux même : au Québec, le taux de chômage des natifs de la Province est de 4 %. Le taux de chômage des migrants, arrivés sur le territoire il y a moins de 5 ans est, lui, de 10 %.
Il y a très clairement un bassin d’emplois inexploité ici, constate Olivier Schmouker.
Le « gaspillage des talents » se voit également dans d’autres domaines.
82 % de candidats ne reçoivent pas de réponse à leurs candidatures. C’est dommageable pour l’image de l’entreprise. Il se peut qu’il n’y ait pas de poste ouvert pour ces candidats actuellement mais que cela sera le cas dans 6 mois ou 1 an. Cela fait vraiment partie de l’expérience que l’on offre. Ils méritent d’avoir un feedback. Ce qui est d’autant plus facile aujourd’hui avec les systèmes d’ATS (Système de suivi des candidatures), illustre Florian Pradon. Il suffit parfois de faire du sourcing dans sa base de données. Il n’y a pas de pénurie, les gens sont là, il faut juste s’adapter à un marché qui évolue ».
Anne Bourhis confirme :
Rappeler les candidats, cela semble être basique, mais cela fait une énorme différence ! Cela apporte une valorisation humaine et professionnelle pour le candidat. Même s’il faut avouer que cela prend du temps pour le recruteur et que ce n’est pas toujours compatible avec la notion de volume. D’où l’importance de bien sensibiliser en interne sur l’énorme travail que représente le métier de recruteur ».
La rétention : fausse bonne idée ?
Enfin, les intervenants ont abordé un dernier sujet, corollaire du recrutement : la fidélisation des employés. Et sur ce point, Florian Pradon se montre catégorique :
Chez GSoft, le but n’est pas de faire de la rétention ! On est très content si nos salariés ont de meilleures opportunités ailleurs. Il ne faut pas lutter contre ça. Au contraire, il faut développer des opportunités en interne, travailler à des valeurs, sur la culture interne... Bref, les stimuler, plutôt qu’à essayer de les retenir à tout prix ».
Sandrine Théard prend l’exemple de Deloitte en Europe, qui pousse ses employés à se bonifier ailleurs… puis de revenir plus tard.
La notion de marque employeur est en effet de plus en plus importante. Cela signifie définir qui on est comme organisation et qu’est-ce qu’on a à offrir. C’est une stratégie perdante si vous attendez que quelqu’un ait un pied dans la porte pour agir, complète Anne Bourhis.
De ce point de vue, le récent rapport de Mercer, cité par Olivier Schmouker, fait froid dans le dos :
On a demandé ce qui rendrait les salariés heureux au Canada. Ils ont répondu :
- Avoir des outil et des ressources pour atteindre leurs objectifs
- Être relativement autonome dans les prises de décision
- Et pouvoir suivre des programmes de formation
Et ces résultats ont été montré aux employeurs… seulement 2% étaient d’accord ! Le problème majeur était le programme de formation. Car cela coûte cher et qu’ils ont peur de perdre leurs salariés après.
Au final, la question est plus de savoir comment rentabiliser l’investissement sur une personne et quel retour sur investissement est capable d’apporter cette personne, plutôt que de savoir comment la garder à tout prix, conclut Éric Bélair.
Plus d’informations sur ce sujet :
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