Analytique, IA, données prédictives… Quelles technologies pour aider les RH à l’avenir ?
Par Kévin Deniau
5 avril 2019
Le 4 avril dernier, se tenait au Palais des Congrès de Montréal l’événement HR Tech. Une journée de conférences et d’échanges consacrée aux technologies dans les ressources humaines. L’occasion de faire le point sur les nouveautés en la matière lors du panel consacré à ce sujet. Isarta Infos y était. Compte-rendu.
Cette intervention, animée par Annie Boilard, du Réseau Annie RH, s’est déroulée devant une salle comble. Il faut dire que le sujet est brulant, à l’heure de la grande transformation numérique des entreprises et notamment des services RH.
Sur scène, trois experts :
- Alain Charlebois, ex VP RH chez Vidéotron ces 6 dernières années
- Ziad Nader, Directeur, Centre Processus et information RH au sein de VIA Rail Canada
- Et Jean-Baptiste Audrerie, Chef de pratique, Technologies et Transformation RH Horizons RH
Dans une ambiance joviale et décontractée, les intervenants ont répondu pendant une quarantaine de minutes aux questions d’Annie Boilard et de l’audience. La première ? Où investiraient-ils s’ils avaient 1 $ supplémentaire à dépenser ?
Je mettrais la moitié dans l’analytique et le prédictif, car cela va grandement aider à gérer le risque en capital humain. Et l’autre moitié dans l’expérience employé, notamment dans des outils collaboratifs pour favoriser la créativité », lance d’emblée Alain Charlebois.
Ziad Nader, lui, ne l’investirait pas nécessairement dans la technologie.
Il faut en effet toujours essayer de comprendre pourquoi on fait cet investissement et l’aligner sur les objectifs de la haute direction. La vraie question à se poser, c’est comment est-ce que ce que l’on fait va aider la vie des gestionnaires. »
De son côté, Jean-Baptiste Audrerie évoque ce qui revient la plupart du temps chez ses clients :
L’analytique et le design ! Avoir une belle interface et si possible, sur mobile. Car au final, ce qui va faire la différence, c’est comment les employés apprécient la solution mise en place. L’objectif premier, c’est de chercher l’adoption ».
Par où commencer ?
Mais avant de penser à la mise en place de technologies plus complexes, Annie Boilard, s’est intéressée aux organisations qui n’en sont qu’à leur balbutiement. Afin de voir par quel bout, ces dernières devaient commencer.
Il ne faut pas faire des choix dans l’urgence d’aujourd’hui et faire tout d’un coup, recommande déjà  Ziad Nader, mais plutôt y aller module par module ».
Un avis partagé par l’ex VP RH de Videotron, qui y est allé d’une métaphore qui a provoqué l’éclat de rire de la salle :
C’est une très mauvaise idée de faire son épicerie quand on a faim et qu’on n’a pas de liste ! Il n’existe pas de solution magique qui marche d’un coup. Il faut manger l’éléphant une bouchée à la fois ».
Pour Jean-Baptiste Audrerie, la première question à se poser est : où est située mon information ?
C’est un vrai défi. Est-elle sur un Excel ou un fichier papier ? Est-ce que j’ai un dossier d’employé riche ? Si on veut offrir une expérience employé intéressante, il faut que ces derniers aient accès à ces infos aussi, elles doivent leur être rendu. Mon organisation est-elle donc capable d’absorber cette donnée ? Sans ça, vous êtes aveugle et démembré ! »
On comprend bien, il ne sert à rien de vouloir conduire une Formule 1 si l’on n’a pas d’essence à mettre dedans. « Il faut également se demander combien de données RH avons-nous vraiment besoin. Il n’est parfois pas utile de vouloir tout migrer vers sa nouvelle base de données, sinon, on peut étouffer », ajoute Alain Charlebois.
Les bonnes pratiques en termes d’implantations technologiques RH… et les déceptions
Une fois que le nouveau projet RH est acté, il convient de le mettre en oeuvre concrètement. Les intervenants ont alors partagé leurs bonnes pratiques en la matière. À commencer par Alain Charlebois :
Il faut voir ce type de projet comme une opportunité de se réinventer. Autrement dit, il faut sortir de l’équipe RH et le voir, plus globalement, comme un projet d’organisation. Si ce projet ne reste cantonné qu’aux RH, les chances d’échec sont plus fortes ».
Un argument complété par Ziad Nader.
La réussite d’un tel projet va dépendre de son imbrication dans les objectifs d’affaires de l’organisation, au-delà des objectifs purement RH. Comprendre les besoins de l’organisation est donc crucial ».
Le directeur de VIA Rail Canada conseille aussi de ne pas essayer de reproduire les solutions déjà existantes et d’essayer de s’ouvrir à ce qui se passe dans le marché.
La bonne préparation est fondamentale, ajoute Jean-Baptiste Audrerie. On entre dans une zone anxiogène pour les RH, c’est-à -dire la planification et la communication en interne. On est en plein dans la gestion du changement. Cela veut dire concrètement changer potentiellement les gens de leur poste opérationnel et savoir les valoriser en leur disant que c’est pour transformer l’organisation ».Â
Il arrive cependant que le projet, une fois réalisé, amène de la déception.
Avant, il fallait vendre son projet au CFO ou au président. Aujourd’hui, il faut le faire à tous les employés. Il faut donc réussir à démocratiser ces technologies RH et les ambitions associées avant, pendant et après son déploiement. Et accepter que cela prenne du temps », témoigne Alain Charlebois.
Souvent, le problème pour Ziad Nader, c’est la différence entre la présentation du système (avec toutes ses fonctionnalités potentielles) et… la réalité de l’organisation.
Le système va dépendre des données auxquels on a accès. Le problème, comme on le disait auparavant, c’est que le dossier d’employé des organisations est souvent vide. C’est-à -dire qu’il se limite à son nom et à son adresse. C’est pourquoi, parfois, il vaut mieux optimiser ce que l’on a déjà que de chercher à tout prix une nouvelle solution ».
Pour éviter cet effet déceptif, Jean-Baptiste Audrerie suggère de mener une démarche concertée avec les employés et ne pas être seulement qu’entre RH.
Les coups de coeur technologiques
En fin de panel, Annie Boilard a demandé aux intervenants leurs derniers coups de coeur technologiques. Pour Ziad Nader, il s’agit des données massives et de l’intelligence artificielle, un thème récurrent au cours de l’événement :
On est en retard en RH sur ces sujets par rapport au marketing. Alors qu’on est assis sur une vraie mine d’or. Potentiellement, on peut être capable de mener des analyses prédictives concernant les départs, de prédire des taux d’absentéisme ou de mobilisation. Cela peut clairement changer notre rôle en tant que RH ».
Jean-Baptiste Audrerie, pour sa part, évoque le marketing RH.
La question aujourd’hui n’est pas juste de gérer des CV mais de nouer des conversations avec les candidats. De les toucher tout au long des points de contact avec l’entreprise. Car on parle de pénurie actuellement. Mais il existe de nombreux candidats passifs qui regardent tout de même les opportunités. Il faut savoir leur parler et les attirer ».
Un point qui suscite l’espoir justement chez Ziad Nader :
Auparavant, on écoutait plus les chiffres et les TI. Mais, l’état du marché des talents force aujourd’hui les CEO à écouter de plus en plus cette réalité. Car leurs objectifs d’affaires sont à risque sans ces talents ».
L’occasion donc pour les RH de faire entendre leur voix !
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