Thérèse David: retour sur 45 ans de communications Reviewed by Mireille Levesque on . Thérèse David, fondatrice de Thérèse David Communications, s'est livrée à Isarta Infos avec une sincérité désarmante. L'ancienne chef du bureau de la culture de Thérèse David, fondatrice de Thérèse David Communications, s'est livrée à Isarta Infos avec une sincérité désarmante. L'ancienne chef du bureau de la culture de Rating: 0

Thérèse David: retour sur 45 ans de communications

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Thérèse David, fondatrice de Thérèse David Communications, s’est livrée à Isarta Infos avec une sincérité désarmante. L’ancienne chef du bureau de la culture de Longueuil, vice-présidente communication et promotion de TQS et du Journal de Montréal s’est attardée sur les mentors qui ont illuminé son parcours professionnel, ses réalisations ainsi que sa vision de la culture. 

4 mai 2017

Vous avez déjà raconté avoir joué le Prélude en Do Majeur de Bach aux funérailles de votre mère et avoir passé deux mois plus tard le concours de baccalauréat en musique. Vous dites ne plus avoir joué en public par la suite, pour vous consacrer à la culture, mais en travaillant davantage en coulisses. Pourquoi?

Thérèse David: Ma mère et moi, nous étions très proches, nous étions les deux artistes de la famille. Elle était écrivaine. Moi, j’étais musicienne, et elle venait toujours m’écouter pratiquer mes gammes. Nous étions liées dans une sorte d’osmose. Lorsqu’elle est décédée, j’étais menée par une très forte adrénaline. Je ne sais pas comment j’ai fait, mais je suis allée à l’orgue, j’ai joué, et je pense avoir bien joué. Ensuite, je suis entrée dans une sorte de passage à vide, dans une profonde dépression. J’ai fini par constater que, pour être pianiste de concert, il fallait avoir du génie. Je crois que j’avais du talent, mais je n’avais pas le génie. Par contre, j’avais le talent de promouvoir le génie des autres en me tenant derrière plutôt qu’en avant plan. Certains diront que je suis une artiste ratée, peut-être, mais en tout cas, je suis une bonne communicatrice.

Vous avez évolué professionnellement aux côtés de Guy Latraverse, que vous qualifiez même de mentor. Que vous a-t-il appris de plus précieux?

Thérèse David: Peu de temps après mon passage à vide, j’ai eu la chance de rencontrer Guy Latraverse sur mon parcours, au début de Kébec-Spec. Le poste d’attachée de presse était libre. J’ai été engagée. Guy m’a tout appris des communications culturelles. Je n’avais pas du tout étudié dans le domaine. Ce que j’enseigne aujourd’hui, c’est ce que j’ai appris de Guy. Il a été mon tout premier mentor. Lorsque Kébec-Spec a fermé ses portes, j’étais devant un dilemme: reprendre le piano ou fonder ma compagnie de publicité et de relations de presse. J’ai fondé ma compagnie. J’ai eu, comme premier client, Yvon Deschamps, avec qui j’ai entretenu une relation professionnelle et personnelle de longue date. J’ai roulé ma bosse ainsi, avec lui et d’autres artistes, pendant 20 ans.

Comment c’était de travailler avec cet artiste tant aimé des Québécois?

Thérèse David: Yvon est un homme extraordinaire, bon et généreux. Il m’a présenté le père de mes enfants, il est le parrain de ma fille. C’est un être sensible et à la fois angoissé. Une chose est sûre, il n’a pas fait tous ses monologues géniaux sans se poser de questions. Il m’a appris à être une bonne attachée de presse, mais aussi les grandes valeurs de la vie. Travailler avec cet homme a été pour moi une véritable leçon de vie et m’a amenée à réfléchir sur les grands thèmes de l’intolérance.

Parmi vos nombreux mandats en culture, vous avez eu la chance de travailler avec Pierre Péladeau à titre de vice-présidente communication et promotion du Journal de Montréal. Vous aviez entre autres le mandat de contribuer à développer le cahier Weekend dédié aux arts et spectacles. Quel a été votre plus grand défi dans ce mandat?

Thérèse David: Mon travail d’attachée de presse m’a permis de croiser la route de Pierre Péladeau, puisque j’étais dans le monde culturel depuis environ 20 ans. Je le rencontrais souvent à l’Orchestre Métropolitain. Il est vite devenu un mentor pour moi.

Thérèse David: Il me répétait toujours cette phrase: «Toi, la petite (parce que j’étais plus grande que lui) [rires], écoute ton nez, ton flair et ton instinct. Puis, apprends à rationaliser ce que ton instinct t’a dicté.» Au fond, ce qu’il voulait dire, c’est «écoute les choses que tu ressens, mais pour mieux les vendre aux patrons, apprends à les rationaliser». Autrement dit, pour lui, sans instinct et sans gros bon sens naturel (GBS), on n’arrivait à rien. Ce que j’enseigne sans arrêt à mes étudiants.

Thérèse David: Comme je travaillais sur beaucoup de dossiers pour Québecor, dont le Gala Clin D’oeil, et que l’entreprise représentait 40 % de mon chiffre d’affaires, je lui ai demandé une job. Je n’en reviens pas encore d’avoir demandé une job à Pierre Péladeau [rires]. Deux mois après, Jacques Girard, président à l’époque du Groupe Québecor m’a demandé de remplacer le directeur des communications, qui devait ralentir ses tâches pour des raisons de santé.

Thérèse David: Le cahier Weekend avait alors déjà été fondé, mais il fallait le développer, rencontrer les producteurs, leur dire d’y croire. Il fallait que ça devienne un outil de promotion. Il m’a approché pour ce travail étant donné que j’avais passé 20 ans dans le milieu culturel et que je connaissais tout le monde. De fil en aiguille, la perception face au cahier Weekend a changé, on a cessé de le mépriser, il est devenu un outil de notoriété. Mais, ma plus grande récompense a été de le voir entrer dans la revue de presse de CKAC. En voyant qu’on en parlait dans la revue du matin, je me suis dit qu’il était devenu un outil important et incontournable.

Thérèse David: En 1997, Pierre Péladeau a acheté Télévision Quatre-Saisons. Il est décédé peu de temps après, le 24 décembre de la même année. J’ai été nommée vice-présidente de la chaîne, et ce fut le plus beau défi de ma carrière. J’ai contribué à instaurer la marque «Le Mouton noir de la télé» avec d’autres créatifs. Il s’agissait d’une marque connue, nichée, irrévérencieuse et originale. Nous donnions dans la télévision anarchique. J’ai eu la chance là-bas de côtoyer notamment Jean-Luc Mongrain, qui a aussi fait office de mentor pour moi. Cet homme extraordinaire ne lisait pas les nouvelles, mais les racontait.

Thérèse David: Lorsque le Mouton noir est «devenu gris» et a changé de logo, je ne m’y reconnaissais plus, et j’ai aboli mon propre poste. Je suis alors retournée à ma propre entreprise. TQS a un peu plus tard fait faillite. Je constate maintenant, toutefois, que V (le nouveau Mouton noir) va bien.

Vous comptez aujourd’hui 45 belles années de métier dans le milieu de la culture et des communications. Que souhaitez-vous léguer aux prochaines générations à ce stade-ci de votre carrière?

Thérèse David: Je suis probablement dans mes dernières années de vie de professeure, avant de me consacrer à mes petites-filles. Ma mission en ce moment est de léguer ma passion et mes trucs aux générations futures. Je vais par contre sûrement continuer de donner des formations, ce que j’adore, et de faire le tour du Québec pour donner des conférences.

Thérèse David: Je souhaite être un agent de démocratisation de la culture. Je n’aime pas les gens qui parlent de la culture avec un grand C. C’est du snobisme. Heureusement, je trouve que ce genre de snobisme est moins fréquent chez les jeunes. Chez eux, je ne constate pas de mépris. Qu’on se le dise: toute forme d’art est intéressante. Quant à ma sous-mission, je crois que ce sera de léguer mon amour de la culture sous toutes ses formes.

Avec l’évolution effrénée des nouvelles technologies, comment entrevoyez-vous l’avenir des médias traditionnels?

Thérèse David: Certains prédisent la mort des médias traditionnels. Moi, non. Ils deviendront, selon moi, des médias d’opinion. Peut-être que les nouvelles se retrouveront davantage sur les réseaux sociaux, mais les journalistes deviendront des influenceurs. Ils aideront le public à analyser l’information, qu’ils soient contre ou pour.

Thérèse David: Les médias traditionnels ne resteront peut-être pas tous là, mais les gros vont rester et se transformer. Si on y pense, tout le monde a prédit la mort de la radio quand la télévision est arrivée. Puis, on a pensé que c’était la fin de la télévision quand Internet a fait son apparition. La télévision va rester aussi selon moi. La plateforme va peut-être se transformer, mais pas son contenu. Les gens auront toujours besoin de contenu.

Vous prétendez avoir été habitée par un dilemme pendant quinze ans, votre penchant pour la culture classique et pour la culture populaire. Y a-t-il deux cultures ou une seule?

Thérèse David: Je dis souvent à mes collègues et étudiants d’arrêter de parler de musique pop ou classique, ou encore de cinéma d’auteur ou commercial. Je leur demande d’arrêter de parler des sortes de cinéma. Du bon cinéma, c’est du bon cinéma. De la bonne musique, c’est de la bonne musique. Point! Je constate que, dans le milieu des arts, il y a des clans. Chez les jeunes, moins. Il faut enrayer le snobisme et convaincre les gens du fait que la culture n’est pas une affaire d’élite.

Vous dites souvent que «pour œuvrer dans le domaine des arts, il faut être un peu groupie». De qui êtes-vous groupie en ce moment?

Thérèse David: Je suis toujours groupie des artistes que je représente. Je suis toujours groupie des gens avec qui je travaille passionnément. En ce moment, par exemple, je suis groupie de nouveaux arrivants que j’ai rencontrés récemment, alors que j’ai travaillé sur un projet pour eux avec le Mouvement national des Québécoises et Québécois. J’ai été aussi très groupie de mes collègues de Longueuil avec qui j’ai contribué, grâce à la mairesse Caroline St-Hilaire, à la fondation du Bureau de la culture, de la Maison de la culture du Conseil des arts de Longueuil. J’aime avoir des coups de coeur professionnels. J’ai adoré l’abum D’eux de Céline Dion. Je suis aussi groupie de Jean Leloup. Quand je donne des formations, je suis groupie de mes étudiants. Et je suis une «fan finie» de mes frères et sœurs, de mes enfants et petits-enfants.

Thérèse David: Si on me demande «Est-ce que tu as aimé tous tes artistes?» Je dis que je n’ai pas aimé tous mes artistes, mais que j’ai aimé quelque chose dans chacun d’eux. Il m’est arrivé à un moment donné de travailler avec une artiste que tout le monde cataloguait de «kétaine», et je suis tombée en amour avec son disque. Je ne suis pas capable d’étiqueter les gens, je prends quelque chose de bon de tous mes artistes. Ils ont tous quelque chose dans le ventre. Et quand je réussis à faire sortir ce je-ne-sais-quoi de leurs tripes, je deviens leur groupie! Ce que je recherche, c’est le leitmotiv intérieur.

La prochaine formation de Thérèse David:

Les grands principes de la relation de presse

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