Pendant le confinement, beaucoup de mères forcées de choisir entre famille et carrière
18 mai 2020
En temps normal, on sait que ce sont les femmes qui s’absentent le plus souvent du travail quand un enfant est malade. Peut-on en conclure que ce sont majoritairement elles qui, en ce moment, compensent la fermeture des garderies et des écoles? Petite enquête sur la question.
Lorsqu’on consulte les données du ministère de la Famille du Québec, on constate que les mères de 2010 étaient majoritaires à s’absenter du travail lorsqu’un enfant était malade. En 2015, une étude de Statistique Canada rapportait que les mères étaient encore et toujours majoritaires à s’occuper «des soins de l’enfant».
Comment cette réalité a-t-elle un impact sur le confinement actuel, où les enfants sont forcés de rester à la maison, pendant que les deux parents travaillent (ce qui pose aussi la question du télétravail pour certains)?
On trouve des échos des tranchées ici et là  :
- Selon un sondage datant du 8 mai effectué par le USA TODAY, 66% des femmes affirment être responsables de la supervision des enfants pendant les heures de travail, comparativement à 41% chez les hommes
- Selon le média Lily (hébergé par le Washington Post), des éditeurs de revue scientifique observent que les femmes chercheuses soumettent moins d’article et que les hommes, qui soumettent 50% plus d’article qu’en tant normal.
- Selon le site Motherly, qui effectue des sondages trimestriels du partage des responsabilités parentales, les pères ont augmenté leur participation de manière significative pendant la crise : de mars à avril, 42 % des mères ont affirmé avoir un partage 50-50, alors qu’elles n’étaient que 30 % à faire une telle affirmation avant la crise.
- En France, un sondage a montré que dans 29,4% des cas, c’est la mère seule qui s’occupe des enfants, dans 4,86% des cas, c’est le père seul et dans 65,74%, ce sont les deux parents.
Des familles sous pression
Que conclure de ces sondages? Le premier constat est que nous faisons face à un portrait nuancé. Les mères, de toute évidence, ne sont pas laissées seules dans cette galère. Une majorité de pères prennent leurs responsabilités et s’occupent eux aussi des enfants.
Toutefois, les parents sont confrontés à la réalité de choisir qui s’occupera des enfants pendant le jour, dans un contexte où les garderies et les écoles sont fermées.
Nous avons posé la question à des mères qui poursuivent leurs activités professionnelles, malgré le confinement, pour mieux comprendre leur réalité.
Je suis en télétravail 35 heures par semaine depuis le confinement, dit Caroline, qui dirige une entreprise de coaching. Mon conjoint aussi. 90 % du temps, c’est moi qui m’occupe des enfants. Mon chum a le gros salaire de la maison, et il parle au téléphone 3/4 de son temps. J’ai un horaire un peu plus flexible, mais quand j’ajoute les enfants, les repas, les tâches ménagères, ce n’est pas évident. »
Difficile d’être aussi «performant» dans les circonstances.
La charge est plus lourde qu’à l’habite, concède Caroline. Aussi, c’est plus difficile d’être efficace au travail. Mais mon moral ne va pas trop mal. Je vis au jour le jour et je fais mon possible. »
Le salaire, bien souvent, est un des critères qui pèsent lourd dans le choix du parent qui s’occupera des enfants au détriment de son travail. En 2020, tout indique que les hommes gagnent encore de meilleurs salaires que les femmes.
L’autre critère décisif est la souplesse d’horaire. Martine, qui est gestionnaire dans le milieu de la santé, doit observer un horaire de travail strict.
Mon homme en fait beaucoup dans les «heures de bureau», puisque je dois être présente au télétravail, explique-t-elle. Il s’occupe des activités éducatives sur ces heures. Il est agent immobilier et, au début du confinement, les visites étaient interdites. On peut dire qu’il a été temps partiel pour un moment, et là , il est de retour à temps plein, mais avec la flexibilité d’horaires. »
Leur situation n’est pas simple pour autant.
Je m’occupe des repas, du coucher ainsi que de tous les week-ends. Ce qui fait qu’il ne nous reste pas 2 secondes, ni à lui ni à moi. Je dois reprendre le travail après le coucher des filles. Il travaille les week-ends. Ensemble, lui et moi, depuis le début du confinement, on roule sur des pneus usés… On continue malgré tout. Nous essayons d’être résilients, en pensant à la chance que nous avons d’être en santé, d’être ensemble, avec nos filles merveilleuses. »
Martine, comme plusieurs mères qui décident de poursuivre une carrière exigeante, vit beaucoup de culpabilité.
Je ne sais pas ce que je donnerais pour pouvoir passer plus de temps avec elles, ajoute-t-elle. J’ai cette grosse culpabilité qui flotte au-dessus de ma tête… culpabilité de ne pas être avec mes filles durant ce moment unique. Culpabilité de beaucoup travailler, et elles me le répètent plusieurs fois par jour! Culpabilité de travailler avec moins de concentration aussi, car, oui, avec des enfants de 4 et 6 ans qui papillonnent autour de moi, la concentration est plus ardue. Enfin, il y a pire que nous. On va passer au travers. »
Pas facile d’être une mère et une professionnelle accomplie, nous avions déjà abordé la question avant la crise. Les mesures de confinement n’auront fait qu’accentuer les choix déchirants que sont forcées de faire les femmes qui désirent mener une carrière.
Devant ce constat, on ne peut que leur souhaiter bon courage ! (Et espérer que l’on retrouve un semblant de normalité dans les semaines ou les mois à venir).
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