Gestion de la performance : Les entreprises québécoises souffrent-elles de bureaucratite aiguë?
23 août 2017
Plusieurs entreprises demeurent frileuses à abandonner leur questionnaire de performance au profit d’une gestion plus souple intégrant de la rétroaction en continu, dit le conférencier et formateur RH, Mario Côté. Entrevue.
Selon une étude américaine, les gestionnaires passeraient en moyenne 17 heures par employés à préparer des évaluations de performance annuelles, alors que 64 % des employés et 62 % des gestionnaires trouvent ce mode de gestion de la performance désuet.
On ne se surprend donc pas d’apprendre, dans ce contexte, que de plus en plus de grandes entreprises américaines délaissent les évaluations annuelles au profit d’une rétroaction en continu : Kelly Services, PwC, Adobe, Deloitte et KPMG constituent les pionniers de cette tendance.
La tendance mondiale, explique Mario Côté, c’est d’arrêter de remplir des formulaires à n’en plus finir et des grilles qui ne répondent pas à nos besoins, puis d’avoir une discussion plus fréquente sur la performance en temps réel dans l’organisation. »
On passe d’un formulaire qui fait 10-12-14 pages, à une feuille recto verso à compléter après la rencontre avec un collaborateur, qui porte sur les points essentiels. Le but, c’est d’avoir une discussion pertinente, au moment où il survient un écart de performance ou si on veut attirer l’attention d’un membre de son équipe sur l’objectif à atteindre. »
Des résistances au changement
Voilà une approche simple, qui tombe sous le sens. Mais le consultant RH constate que malgré tout le changement ne se fait pas sans heurt.
Même dans les organisations qui veulent revoir leur processus, il y a de la résistance au changement. Cette résistance est liée aux habitudes et aux réflexes des gestionnaires de vouloir tout documenter. »
Les cotes associées à la performance des employés semblent également être un sujet sensible :
Les gestionnaires plus « cartésiens » y sont très attachés. Je ne veux pas caricaturer, mais si je dis à un directeur des finances – qui aiment les chiffres – que je veux retirer les cotes, ça le déstabilise. »
Pourtant, on sait que les système de cote provoque des discussions stériles, qui peuvent aller jusqu’à démobiliser un employé qui performe. Si, à 3 sur 5, un employé « répond aux attentes », ce n’est pas ce que les gens retiennent. Ils voient un piètre résultat de 60%. Tout le monde veut avoir 5 sur 5.»
Mario Côté constate qu’il est également difficile d’élaguer les questionnaires des questions inutiles :
Est-ce encore nécessaire de mettre la correspondance de profil de compétences d’un employé qui est en poste depuis 10 ans? S’il est en poste depuis tout ce temps, c’est qu’il répond au profil! Je tente de convaincre les entreprises de retirer cela de leur formulaire, car ça ne sert à rien dans la discussion que tu dois avoir avec l’employé sur la performance de la semaine à venir. Mais je vois aussitôt l’insécurité que ça crée. »
Un précurseur québécois
S’il y a une réticence à abandonner les longs questionnaires, il ne faut pas en conclure que tous les dirigeants sont réfractaires au changement. Mario Côté cite en exemple Vidéotron, une entreprise de nos « phares » au chapitre de la gestion :
Quand ils ont revu leur processus de gestion de la performance, il y a presque 3 ans, c’est une des VP dans une des unités d’affaires qui est arrivée dans le bureau de la directrice des ressources humaines avec un article sur l’approche de gestion de Netflix, en disant : comment on peut adapter cette approche à notre organisation. Ça, c’est le scénario de rêve. Une direction des ressources humaines qui s’inspirent des tendances mondiales et qui revoient les processus avec la participation de la haute direction, mais en faisant coller cela à sa culture d’entreprise. »
Il y a de l’espoir, donc!
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